Le chef de la Coalition de l'opposition syrienne Ahmed Moaz al-Khatib a créé la surprise mercredi en se déclarant prêt à dialoguer, sous conditions, avec des représentants du régime, dans un texte posté sur sa page Facebook. Cette proclamation a semé la stupeur parmi les opposants et le Conseil national syrien (CNS), principale composante de la Coalition, a estimé qu'elle "ne reflète en aucun cas la position de la Coalition et va à l'encontre des principes fondateurs de la Coalition (...) qui refuse de discuter avec le régime meurtrier". "J'ai appris par les médias que le régime en Syrie avait appelé l'opposition à dialoguer et avait chargé le Premier ministre de mettre en place ce projet et que le ministre de l'Intérieur du régime avait appelé les opposants à rentrer en Syrie", affirme M. Khatib. "En signe de bonne volonté vers une solution politique à la crise et pour ouvrir la voie à une période de transition mettant fin à l'effusion de sang, j'annonce que je suis prêt à des discussions directes avec des représentants du régime syrien au Caire, en Tunisie ou à Istanbul", affirme M. Khatib. "Il s'agit de ma vision personnelle et j'en assume la responsabilité", précise-t-il, précisant que la Coalition se réunira jeudi pour déterminer sa position officielle. Il ajoute prendre cette décision car "la révolution continue et il n'est plus question de chercher à gagner du temps alors que les citoyens syriens vivent une crise sans précédent" depuis qu'a éclaté en mars 2011 une révolte populaire devenue conflit armé qui a fait, selon l'ONU, plus de 60.000 morts. Le chef de la Coalition pose toutefois deux conditions préalables: la libération "des 160.000 personnes" détenues dans le cadre du soulèvement contre le régime et le renouvellement des passeports des Syriens de l'étranger --dont beaucoup ont quitté le pays de façon illégale-- dans les ambassades afin qu'ils ne soient pas arrêtés à leur retour. Mais, "on ne peut faire aucun compromis sur la liberté pour laquelle notre peuple a payé chèrement de son sang, donc je pose des conditions de base avant de discuter directement avec des représentants du régime", dit-il encore. Et, prévient-il, "nous ne discuterons pas du maintien du régime mais de son départ avec le moins de sang et de ruines possibles", car "on ne peut faire confiance à un régime qui tue des enfants, attaque les boulangeries, bombarde les universités, détruit les infrastructures de la Syrie et massacre des innocents". Alors que ces déclarations provoquent l'émoi au sein de l'opposition, M. Khatib dénonce dans un long texte "des Etats (...) qui disent aux Syriens +Attaquez!+ et les abandonnent au milieu de la bataille", ceux "qui promettent de l'aide aux révolutionnaires (...) et les laissent mourir" et d'autres qui "s'asseoient sans rien faire et disent +Attaquez, ne négociez pas!+". "Je dis en toute franchise qu'il y a des brigades (rebelles) sur le terrain qui n'ont pas de quoi acheter du pain et qui protègeront la révolution jusqu'à leur dernier souffle, elles sont le bouclier de la révolution qui a défié le fer, le feu, le terrorisme et la prison", lance encore M. Khatib. Le président Bachar al-Assad a proposé début janvier un plan de sortie de crise prévoyant un dialogue national à Damas, catégoriquement refusé jusqu'ici par l'opposition qui pose comme condition sine qua non le départ de M. Assad. Le gouvernement met actuellement en place les dispositifs nécessaires à ce dialogue et les autorités ont récemment multiplié les appels au retour des opposants et des réfugiés en Syrie, assurant leur donner toutes les garanties pour qu'ils ne soient pas inquiétés une fois la frontière passée. Mardi, l'opposition tolérée s'est dit prête à établir un processus politique de dialogue entre régime et opposition pour mettre en application l'accord de Genève qui prévoit une transition en Syrie.