L'ONU laissera-t-elle le Maroc faire comme en 2004 quand il a « limogé » James Baker qui a fait de la question du référendum d'autodétermination une option incontournable après une période transitoire d'autonomie de cinq ans maximum. Selon Rabat, l'Américain s'est écarté des grandes lignes qui ont été tracées par les négociations dans le Conseil de sécurité. Comment ? Quand ? Le Royaume chérifien ne l'explique pas. Raisons réelles ? Elles seraient au moins deux. La première, la décision annoncée en mars dernier par Christopher Ross de se rendre « à la mi-mai » dans la région « y compris dans le territoire du Sahara occidental » où il veut « étendre le contrôle de la Minurso » et le respect des droits de l'Homme. La seconde, le dernier rapport du Secrétaire général de l'ONU. Attribué par Rabat à l'Américain, ce document dénonce, pour la première fois depuis 1975, les agissements marocains et rappelle la mission basique de la Minurso : préparation du référendum d'autodétermination. Et pour corser le tout, ce document met en avant les tentatives de Rabat d'isoler les Sahraouis, d'empêcher le libre mouvement de la Mission de l'ONU au Sahara occidental et d'espionner les communications confidentielles de la mission onusienne. Selon ce rapport, la Minurso n'est en mesure « ni d'exercer pleinement ses fonctions de surveillance, d'observation et de liaison liées au maintien de la paix, ni d'endiguer, de sa propre autorité, l'érosion de ses capacités de mettre en œuvre son mandat ». Ni, poursuit-il, plus loin, de garder son « principe de neutralité » qu'elle a perdu depuis « de nombreuses années ». Le Maroc, qui a été sommé, le 24 avril dernier, par les « quinze » d'« améliorer la situation des droits de l'Homme » au Sahara qu'il occupe, en mettant en place des « mesures crédibles, n'est pas à son premier caprice en 2012. Il a refusé, le mois dernier, l'officier allemand qui devait remplacer l'actuel chef de la Minurso, Abdelaziz Hani. Le Polisario estime « infondée et arbitraire » la décision du Maroc. « C'est un nouveau défi intolérable et inadmissible du Maroc à la communauté internationale, au Secrétaire général de l'ONU et au Conseil de sécurité qui, dans sa résolution 2044 du 24 avril dernier, a considéré le statu quo inacceptable », poursuit le mouvement sahraoui, soupçonnant le Maroc de vouloir « s'arroger, sans vergogne, le droit de dicter au Secrétaire général de l'ONU le contenu de ses rapports au Conseil de sécurité et de décider de la conduite que doit suivre » M. Ross. L'Algérie renouvelle son soutien aux efforts « inlassables » menés par l'Américain pour résoudre le dernier conflit colonial en Afrique. Les Etats- Unis, qui appuient « une solution pacifique, durable et mutuellement acceptable » à ce conflit du Sahara occidental, soutiennent leur diplomate. Grande inconnue, la France. François Hollande qui n'est pas un habitué de la résidence royale Mamounia (Marrakech) comme Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, va-t-il s'aligner sur ces prédécesseurs ou osera-t-il qualifier comme l'a fait son parti la présence marocaine au Sahara occidental d'« occupation » ? Les partisans du respect des droits de l'Homme souhaitent au moins une neutralité de Paris. Mohamed VI et Saad Edine El Otmani, qui ont tenté, mais en vain de dénicher à Washington, New York et Paris « qui pourrait dissuader » Ross de se rendre au Sahara Occidental et de chercher à élargir les missions de la Mission, veulent remplacer l'Américain par un Européen, si possible un Espagnol ou Français.