On croyait le FFS à l'abri des turbulences à qui étaient imputés les divers mouvements de redressement. Il s'est toujours présenté comme une sorte de citadelle assiégée et un modèle de parti sans boussole que ses principes et son programme. Ce n'est pas la première fois, à vrai dire que le vieux parti d'opposition affronte les démons de la désunion. En 1998, un groupe de députés avait rompu l'unité de son groupe parlementaire. Dans les années qui ont suivi, des mécontents sont régulièrement montés au créneau pour exiger « un fonctionnement plus démocratique du parti ». Ils avaient alterné meetings, déclarations, mais à chaque fois, Aït Ahmed a adoubé et conforté les directions. La contestation qui agite ces rangs ces jours-ci parait néanmoins plus grave. Elle intervient dans un contexte où la succession au fondateur du FFS se pose en termes ouverts. Elle implique davantage de personnalités au point d'apparaître comme une véritable scission. Dans le passé, on cherchait à remettre sur les rails un parti. Maintenant, il s'agit d'un divorce. Pour autant, la contestation que mène Karim Tabbou d'un côté, rejoint par des membres du Conseil national et celle initiée par d'anciens cadres comme Zenati et Bouhadef ne risque pas de conduire à l'éclatement du parti. Il vivra dans le pire des cas un scénario semblable au MSP où des cadres ont créé un parti concurrent sans plus. Beaucoup de militants comprennent mal la nouvelle posture de l'ex-premier secrétaire national. Il fut très acerbe à l'endroit de ceux qui, à des moments donnés, mirent en cause le fonctionnement du parti. Le langage qu'il tient aujourd'hui ne convainc pas trop ceux qui se rappellent les mêmes termes qu'il utilisait pour pourfendre ceux qui contestaient sa gestion. L'autre faille est la difficulté de former un front opposé à la direction actuelle. Il sera difficile de trouver un terrain d'entente pour proposer un projet crédible en dehors des ressentiments. La nouvelle direction a beau jeu de rappeler que certains contestataires ont depuis longtemps quitté le parti et qu'à ce titre, il ne se sent plus concerné par leur action. « Ces personnes ont voulu faire dissidence, non pas parce que le FFS a dévié de sa ligne politique comme ils l'affirment, mais parce que, pour la majorité d'entre eux, leur candidature n'a pas été retenue aux dernières élections », explique le député de Bejaia et chargé de la communication du FFS, M. Chafaa Bouaiche. L'apparition de la dissidence au lendemain même de la confection des listes de candidats aux législatives donne quelque crédit à ses propos. « Si vraiment M. Tabbou a de l'éthique politique, qu'il remette son mandat de député, puisque il a été élu sur la liste du FFS », a-t-il fait remarquer.L'équipe dirigée par Ali Laskri a, par ailleurs, entamé un travail de recentrage qui, à terme, peut assurer un meilleur ancrage au parti et rompre avec la politique de la chaise vide qui a causé beaucoup de tort au FFS. Le fait que Karim Tabou et ceux qui s'inscrivent dans sa démarche aient décidé de ne plus mener le combat à l'intérieur des structures du parti est un indice sur une bataille perdue. Se cramponner à la radicalité qui, en fin de compte, a marginalisé le parti, n'agréait pas tous les militants. Beaucoup voient dans la nouvelle direction une manière de sortir du ghetto le parti qui ambitionne d'élargir son audience.Le feuilleton ne risque pas de connaître de sitôt son épilogue. Le FFS se voit contraint de poser la question qu'il a crue jusque-là réservée aux autres.