Le harcèlement sexuel sur les lieux de travail et la violence à l'égard des femmes a été le thème débattu, hier, à Alger par des représentantes de la police et des militantes de la cause féminine, à l'occasion d'une rencontre organisée par l'association pour le Rassemblement contre la Hogra et pour les droits des Algériennes ». Selon Soumia Salhi, syndicaliste et militante féministe, le harcèlement sexuel sur les lieux de travail peut aller jusqu'au viol. « Le harceleur peut être charmant et insoupçonnable. Lorsque la victime ne parvient pas à apporter suffisamment de preuves, le harceleur peut porter plainte pour diffamation et obtenir des dommages et intérêts », s'est-elle révoltée. « Le harcèlement sexuel pousse la victime à la dépression, la rend incapable de travailler et détruit sa famille et son environnement », a-t elle prévenu, expliquant que cela peut commencer par des grossièretés, invitations gênantes, menaces. Pourtant, l'Organisation mondiale du travail (OIT) considère le harcèlement sexuel comme une question relevant des droits de l'Homme, voire un problème de discrimination vis-à vis de la femme. En Algérie, dira Mme Salhi, une campagne menée, en 2003, par la commission des femmes travailleuses de la centrale syndicale UGTA a brisé le tabou grâce aux plaintes de salariées. BEAUCOUP DE CAS N'ENGAGENT PAS DES POURSUITES JUDICIAIRES Pour sa part, le professeur Merrah, médecin légiste au CHU Béni Messous, a précisé que la violence conjugale est en recrudescence. Elle a précisé que son service reçoit quotidiennement 3 à 4 victimes. Ces femmes violentées sont âgées entre 21 et 45 ans. 68% des cas ont une moyenne d'âge comprise entre 35 et 66 ans. « Les femmes violentées ne sont pas faibles mais veulent tout simplement sauver la face », dira-t-elle. Et d'ajouter : « la majorité des femmes qui viennent aux consultations le font en cachette et ne gardent jamais leur certificat médical ». Selon la spécialiste, 70% des cas enregistrés au niveau du service de la médecine légale de Béni Messous n'ont pas porté plainte, 27% ont entamé des poursuites judiciaires alors que 3% ont déposé plainte pour coups et blessures volontaires. Elle explique que les principales causes qui poussent le conjoint à la violence sont les troubles psychologiques, la consommation de drogue ou d'alcool, les difficultés financières, l'infidélité ou les problèmes d'ordre sexuel. Mme Merrah estime que les femmes victimes de violence ne connaissent pas leurs droits, elles craignent le rejet social, et ont peur des représailles en cas de poursuites judiciaires. 8.748 FEMMES VIOLENTEES EN 2012, SELON LA DGSN Selon Kheïra Messaouden, commissaire divisionnaire, chargée du dossier de l'enfance et des femmes victimes de violence à la DGSN, le bilan de l'année 2012 fait état de 8.748 cas de violence dont 6.446 agressions physiques, 1.928 mauvais traitements, 294 cas de harcèlement sexuel et 5 cas d'inceste. D'après elle, 46% des agressions ont été commises hors famille, 23% par les époux, 6% par les enfants, 5% par les frères, 0,6% par les pères, 3% par les amants et 0,32% par les fiancés. L'âge des femmes violentées est de 19 à 75 ans, issues de toutes les couches sociales. 4.842 sont mariées alors que .867 sont célibataires et 946 divorcées. 1.890 femmes ont un niveau moyen, 1.846 (secondaire), 1.060 (universitaire), 5.706 (sans emploi), 1.578 employées, 458 étudiantes, 59 commerçantes, 47 retraitées et 56 exercent une profession libérale. 46% des femmes ont été agressées dans le domicile conjugal, 2% violentées au travail et 13% dans le quartier. « Le code de la famille adopté en juin 1984, fait de la femme algérienne une mineure à vie », a indiqué, quant à elle, Dalila Aoudj, présidente de l'association Rachda. Selon elle, après 20 ans de lutte, ce texte a finalement été amendé en février 2005. « Malheureusement, ces amendements restent insuffisants », dira-t-elle.