Si « la musique adoucit les mœurs », la thérapie par l'art est devenue une réalité, y compris en Algérie où elle commence à être adoptée comme moyen d'accompagnement et d'« adoucissement » de maladies lourdes comme l'autisme. L'association Chem's est à l'origine d'une expérience inédite dans le sens où les autistes sont impliqués dans cette thérapeutique qui stimule leur sensibilité, améliore leur stabilité et favorise leur intégration sociale. De la musique, du théâtre, de l'expression corporelle, de l'expression écrite et plastique sont proposés à ces personnes en difficulté, encadrées par un personnel spécialisé qui a l'avantage d'avoir, de surcroît, exercé en milieu hospitalier. « L'intérêt de cette démarche consiste à mettre dans le même cours des autistes, des trisomiques et d'autres pathologies proches avec des personnes valides de tous les âges pour favoriser l'échange entre eux », explique le président de l'association, Djamel Merahi, qui précise que des mères, voire des grands-mères de malades, se sont inscrites dans la même séance. La seule distinction est imposée par le degré de l'affection, les troubles de l'autisme variant d'un cas à un autre : « Pour la musique, il s'agit d'abord de stimuler leur éveil par des jeux musicaux, du bruitage avant qu'ils n'accèdent au palier de l'instrumentation, du chant, solfège, chorale, ... », explique Merahi. « Des résultats surprenants sont parfois observés : c'est le cas d'un trisomique qui a évolué en musique au point de former à son tour des autistes », dit-il. « Le chant est une activité orthophonique par excellence qui lui procure de l'assurance et est perçu comme un modèle par les autres », souligne-t-il. « Lorsqu'ils apprennent la musique, ils sont plus réceptifs que s'ils étaient en milieu hospitalier. Ils finissent par prendre goût à ces cours si bien qu'il est difficile pour eux de s'en passer », fait remarquer Merahi. Sara, la maman de Yasser, 5 ans, abonde dans le même sens pour attester de « l'impact positif » de cette expérience sur le comportement de son fils autiste inscrit depuis novembre 2012 en musique. Yasser est devenu, selon les dires de sa maman, plus concentré, plus calme et surtout « moins angoissé ». Sara envisage de l'inscrire dès l'année prochaine à la section théâtre et a convaincu Malika, également mère d'autiste, de faire de même. L'intégration par le mélange... Dassine, qui souffre de retard mental et de problèmes de psychomotricité, est accompagnée de sa maman. « Ce qui est particulier ici, dit-elle, c'est l'intégration que crée ce mélange. » Et d'ajouter : « Les malades sont tirés vers le haut. Moi-même, je me suis inscrite en cours de musique et fait partie de l'orchestre de l'association ». Cette chorale fait la fierté de Merahi pour s'être produite en Algérie et même en France (Lorraine) sur invitation de l'association « Turbulence » qui a été « impressionnée » par la démarche ludique et thérapeutique de Chem's. Le répertoire enseigné varie de l'arabe, au français, au kabyle mais aussi de l'international. « On ne peut imaginer le bonheur des parents lorsqu'ils voient leurs enfants sur scène en costume d'artistes. Un statut qui fait oublier pour un moment qu'ils sont différents ! », se réjouit Merahi. Des artistes peintres sont également unanimes à relever l'effet positif que peut produire la peinture sur un autiste, comme le précise si bien le plasticien Farid Benyaa. La peinture peut être pour l'autiste un « moyen d'expression » qui contribue à améliorer ses performances sensitives et son « contact avec son environnement », ajoute-t-il. En plus d'être complémentaire à la prise en charge médicale de l'autisme, le soutien par l'art est ainsi une démarche hautement bienfaisante et de nature à atténuer sensiblement les multiples contraintes liées à cette maladie.