Un réseau national spécialisé dans la falsification des décisions d'attribution de lots de terrain, en contrepartie de plus de 700 millions de centimes, qui activait depuis trois ans, vient d'être démantelé. Le commandement de la Gendarmerie nationale a instruit toutes ses unités pour traquer les escrocs « des lots de terrain et des logements » qui apparaissent à la veille de chaque opération de relogement, a indiqué, hier, le responsable de la communication auprès de la GN, le lieutenant-colonel Abdelhamid Kerroud. En effet, les investigations enclenchées par les enquêteurs de la compagnie de la GN de Douéra, sur la base d'un renseignement, ont permis d'identifier l'un des membres du réseau, interpellé à Birtouta. Il s'agit d'un riche commerçant, sexagénaire, qui possède des biens immobiliers, a fait savoir le chef de la compagnie de Douéra, le capitaine Ryadh Baraket, dans un point de presse hier à Alger. « C'est grâce à l'infiltration du réseau bien structuré et organisé, que les enquêteurs ont pu remonter la filière. Notre priorité était le démantèlement du réseau dont les préjudices sont énormes pour les victimes, compte tenu des sommes d'argent versées pour des lots de terrain dont les décisions d'attribution étaient falsifiées », a précisé le conférencier. Les investigations ont permis également de localiser un local de vulcanisation, équipé de caméras de surveillance. La perquisition a permis de découvrir qu'il s'agissait d'un atelier de falsification des documents administratifs et officiels. Les gendarmes ont saisi à l'intérieur du local du matériel sophistiqué d'informatique. Deux personnes ont été arrêtées sur place. Un étudiant et un technicien supérieur en informatique. Ce dernier, âgé de 30 ans, est considéré comme « le cerveau » du réseau. Le vice-président de l'ex-APC de Khraïcia impliqué Selon le capitaine Baraket, ce dernier, qui est également gérant d'un cybercafé, procédait à la falsification des décisions d'attribution de lots de terrain, aux membres du réseau, moyennant 10 millions à 20 millions de centimes. La perquisition du local a permis la saisie de troisunités centrales, d'un scanner, de décisions d'attribution de lots de terrain scannées destinées à la vente, de différents cachets d'administration. Par ailleurs, les investigations enclenchées depuis plus d'une semaine ont permis d'identifier le mode opératoire adopté par les mis en cause. Ces derniers ciblaient les quartiers chics de la capitale à savoir Hydra, El Achour, Ben Aknoun, Draria et proposaient aux intéressés des lots de terrain situés hors Alger, dans les communes de Khraïcia, Birtouta et Douéra avec permis de construire grâce à la complicité d'un entrepreneur. Une fois le contrat conclu, la décision d'attribution est vendue entre 160 millions et 750 millions de centime selon la superficie demandée par le client, ne dépassant pas 300 m2. Les décisions d'attribution saisies datent de la période 2001-2002, a-t-on constaté sur place. Le lieutenant-colonel Kerroud a expliqué que la vente des terrains, interdite, depuis 1992, dans toutes les communes du pays, est du ressort des agences foncières. Pour duper leurs victimes, les escrocs leur assuraient qu'ils peuvent les intégrer dans l'ancienne liste surtout que les membres du réseau circulaient à bord de véhicules de type 406 et Golf série 5 et résident dans un quartier résidentiel à Baba Ahcène et possédent plusieurs commerces. « Ce sont des gens aisés qui habitent des villas et personne ne doutait de leur intension criminelle. Les victimes croyaient qu'elles ont affaire à des personnalités influentes », a ajouté le chef de la GN de Douéra. Lors de la perquisition des huit villas des mis en cause, les enquêteurs ont récupéré un lot important de documents falsifiés dont 65 décisions d'attribution de lots de terrain, 21 décisions signées prêtes à l'utilisation et 27 plans. Des véhicules ont été aussi confisqués lors de cette perquisition ainsi qu'un fusil de chasse détenu illégalement. Au total, huit individus, âgés entre 24 et 60 ans, dont quatre repris de justice, ont été présentés, hier, devant le procureur près le tribunal de Koléa. L'ex-vice-président de Khraïcia, chargé de l'urbanisme, ainsi que le président d'une exploitation agricole ont été également interpellés dans cette affaire. Ils sont poursuivis pour « association de malfaiteurs, escroquerie, faux et usage de faux de documents officiels et administratifs ». Un complice en fuite est activement recherché. Les bidonvilles, l'autre cible des escrocs Le porte-parole de la GN a appelé les citoyens à plus de vigilance. « Comment acheter des lots de terrain avec des décisions d'attribution établies par la commune, en 2001 et 2002, alors que ces opérations sont interdites aux APC depuis 1992 ? Il n'y a pas d'intermédiaires entre les commissions d'attribution de logements et l'administration », a tenu à préciser le lieutenant-colonel Kerroud. Les victimes de ce trafic doivent être nombreuses au niveau du territoire national vu le nombre de décisions vendues estimées, selon les premiers éléments de l'enquête, à plus de 65. Quatre d'entre elles, dont deux originaires de la wilaya de Ghardaïa, se sont présentées, hier, au siège de la brigade de la GN. Par ailleurs, le commandant de la compagnie de la GN de Douéra a signalé que des membres de ce réseau ont contacté des habitants des bidonvilles à Douéra, exclus de l'opération de relogement prévue à la fin de ce mois. « Des décisions falsifiées d'attribution de logements sociaux leur ont été proposées mais la neutralisation du réseau a permis de déjouer leur acte », a-t-il fait savoir.