L'annonce de la tenue de la première élection pluraliste dans l'histoire de la Syrie en plein conflit, pour le 3 juin prochain, n'a pas laissé indifférents les acteurs de la crise qui secoue le pays depuis 2011. A commencer par la Coalition nationale de l'opposition syrienne, soutenue par les Occidentaux et quelques pays de la région, qui a qualifié, lundi, cette décision de « farce » qui sera « rejetée par la communauté internationale ». Dans un communiqué, le bureau du chef de la Coalition, Ahmad Jarba, a expliqué l'« impossibilité » de l'élection : « Il n'y a pas de corps électoral en Syrie capable d'exercer son droit de vote ». Car, soutient-il, « de vastes secteurs de la Syrie ont été complètement détruits par l'aviation, l'armée et les milices d'Al-Assad ces trois dernières années », et « un tiers de la population est déplacée dans le pays ou (hébergée) dans des camps de réfugiés dans la région ». De son côté, l'ONU, qui parraine le dialogue de paix entre le gouvernement syrien et l'opposition en exil à Genève, a vivement critiqué l'organisation d'un scrutin présidentiel « en pleine guerre », estimant qu'une telle démarche allait « torpiller les efforts pour aboutir à une solution politique ». « La tenue d'une élection dans les circonstances actuelles, en plein conflit et avec des déplacements massifs de population, va nuire au processus politique et éloigner la perspective d'une solution politique dont le pays a tant besoin », a affirmé son porte-parole de l'ONU, Stéphane Dujarric, pour qui « une telle élection est incompatible avec l'esprit et la lettre du communiqué de Genève sur une transition démocratique ». La réaction américaine a été la plus musclée. Non pas au sujet du prochain rendez-vous électoral qu'elle a vigoureusement dénoncé, mais en accusant, « preuves à l'appui », Damas d'avoir recouru aux armes chimiques. La porte-parole du département d'Etat, Jen Psaki ; a fait savoir que les Etats-Unis « disposent d'éléments donnant à penser qu'une substance chimique toxique, probablement du chlore, a été utilisée en avril dans le village de Kfar Zeïta », pointant du doigt le régime de Bachar al Assad. Cette déclaration va dans le sens des propos tenus par le président français François Hollande qui dit détenir « quelques éléments » sur l'utilisation d'armes chimiques dans des attaques qui auraient eu lieu dans le nord-ouest du pays ». Des militants et l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), établi à Londres et proches de la Coalition de l'opposition, avaient accusé la semaine dernière l'armée d'avoir mené une frappe aux barils d'explosifs ayant causé « suffocations et empoisonnements » à des habitants. Damas s'en défend. La télévision syrienne avait accusé le Front al-Nosra, branche syrienne d'al-Qaïda, d'avoir attaqué Kfar Zeïta au « chlore toxique ». Alors que la bataille de la présidentielle a révélé un régime sûr de sa victoire finale sur le « terrorisme », la bataille des armes chimiques, qui entend fragiliser Damas, est lancée.