Après une cérémonie protocolaire, les députés ont, selon l'élu Abou Bakr Biira qui a présidé la réunion, prêté serment dans l'après-midi avant d'élire le président de la Chambre des représentants. Les islamistes et leurs alliés de Misrata, qui ont qualifié cette rencontre de Tobrouk d'« anticonstitutionnelle » au motif qu'il revient au président du CGN (Congrès général national), Nouri Abou Sahmein, de convoquer la réunion à Tripoli en sa qualité de « commandant suprême des forces armées » pour assurer la « passation de pouvoir », ont boudé la cérémonie. « Désormais, nous sommes dans une situation où il y a deux autorités différentes : une issue des élections législatives à Tobrouk et une sur le terrain qui domine les trois grandes villes du pays » (Tripoli, Benghazi et Misrata), estime Salah Al-Bakouch, un militant politique pro-islamiste. A Tobrouk, la caution de 160 élus (sur les 188), confortée par la présence de représentants de la Ligue arabe, de la mission de l'ONU en Libye et de l'Organisation de la conférence islamique (OCI), marque le choix démocratique en totale opposition avec le langage des armes privilégié par des islamistes en perte de vitesse et générant de Tripoli à Benghazi en passant par Misrata, le règne de la terreur. Le chaos généralisé de la Libye des milices traduit l'échec du « printemps arabe » en cendres. Dans le grand brasier qui consume les chimères occidentales du modèle démocratique, la violence endémique, qui a fait au moins 200 morts et 1.000 blessés en deux semaines de combats entre les milices de Misrata et de Zenten, jonche un drame qui laisse de marbre l'Occident coupable de non-assistance à un peuple en danger de mort. Le gouvernement intérimaire a pointé du doigt la « situation humanitaire » qui s'est aggravée dans la capitale prise dans la spirale de la violence et souffrant de la pénurie de carburant, de gaz et des problèmes d'approvisionnement en denrées alimentaires. C'est par vagues entières que les Libyens et des étrangers fuient l'enfer marqué au fer rouge par la terrible tragédie de Lampedusa et de Malte (400 morts). Depuis le début de l'année, dans le cadre de l'opération Mare Nostrum, la marine italienne a secouru plus de 93.000 candidats à l'émigration. Dans cette Libye en ruines, le départ massif des étrangers accentue la scène de désolation d'un pays livré à la folie sanguinaire de ses bourreaux sans foi ni loi. Alors que la frontière tuniso-libyenne craque sous le poids des arrivants en quête de cieux plus cléments, l'Europe se mobilise pour évacuer ses ressortissants. L'ancien secrétaire général de la Ligue arabe, l'Egyptien Amr Moussa, estime que la situation peut contraindre son pays à user de son « droit d'autodéfense ». « La situation en Libye est devenue une source d'inquiétude pour l'Egypte, mais aussi pour les pays du voisinage et du monde arabe », dit-il estimant que « la partition de la Libye en plusieurs petits Etats et émirats, dirigés par des organisations extrémistes, constitue une menace directe pour la sécurité nationale de l'Egypte ».