De nombreuses figures emblématiques de la scène artistique algérienne ont fait le déplacement pour assister au retour de Takfarinas sur scène après une longue absence. Des centaines de personnes avaient pris d'assaut le site où, pendant plus de deux heures, l'artiste a égayé l'assistance, toujours insatiable de ses chansons cadencées de mots. Le maestro a gratifié le public présent à ce spectacle de haute facture d'un chapelet de chansons puisées de son riche répertoire. Avec une orchestration plus riche, Takfarinas a présenté un spectacle à la croisée de plusieurs styles musicaux. Reprenant avec l'artiste et ses quatre choristes les refrains des chansons, le public s'est relâché occupant une partie de l'arène en bas de l'hémicycle, laissant leurs corps en mouvement s'exprimer dans l'allégresse et la volupté. Dans le lyrisme des textes, chantés dans des modes chaâbi et orientaux, avec des arrangements modernes dans des rythmes composés, l'artiste a fait montre de beaucoup de profondeur dans ses recherches musicales et poétiques. Les sonorités des guitares, percussions (tumba, timbales, tambourin et derbouka), basse, batterie, claviers, saxophone, flûte, trompette ainsi que celles de la guitare aux deux tables harmoniques de l'artiste vedette, ont donné un son lourd et percutant à l'orchestration. Les instrumentistes ont brillé par leurs envolées phrastiques aux consonances jazz, affichant une technique de haute facture et une dextérité appréciées par un public qui a eu du répondant. Par moments, l'artiste exécutait quelques pas de danse aux côtés d'une danseuse qui illustrait le contenu de chaque chanson par les différents accoutrements qu'elle enfilait tout au long de la soirée. Durant plus de deux heures de temps a chanté, dansé, exalté les passions avec ses solos endiablés exécutés avec la seule envie de donner du plaisir à un public admiratif qui s'est totalement libéré. Témoignant d'une rigueur absolue et d'un travail de préparation soumis aux strictes normes académiques lors des répétitions, les musiciens ont été unanimes quant au plaisir qu'ils éprouvent à jouer avec Takfarinas qui, selon eux, « déborde de bonté et génère une énergie positive et de l'entrain ». L'assistance, qui a chanté en chœur jusqu'à une heure tardive de la nuit, aura ainsi renoué avec les airs nostalgiques de cet artiste qui a repris des tubes phare de son répertoire comme « Azul », « Azar », « Aârous », « Aysiyi », « Awah awah », « A Lounès », « Mazal mazal », « Aya Aâssas Nez'Zahriw », « Alwaldin », « Kimeth Yidhi », « Ouiza », « Yeppa Er'Rem'Mane », « Ghezmen Ech'Choucha » et « Zaâma ». La communion avec le public était complète. Il ne quitte la piste sous aucun prétexte, donnant libre cours à sa spontanéité. Après chaque morceau interprété, l'artiste a eu la capacité d'enchaîner titre sur titre sans s'arrêter. Ce qui plaît encore plus au public. Notre artiste a offert un concert troublant par des qualités mélodieuses, mais surtout par l'émotion. Un véritable régal pour le public qui a longtemps applaudi, dansé et chanté parfois sur un rythme endiablé qu'imposa Takfarinas. Doté d'une voix exceptionnelle, Takfarinas s'est démené en véritable bête de scène. Le public est conquis. Le spectacle d'énergie et de vivacité a ravi les férus de ce genre musical. Voilà un chanteur qui incarne l'âme kabyle dans toute sa splendeur, permettant ainsi à des générations entières de perpétuer le legs ancestral. Ce qui explique la présence remarquable de jeunes et de vieux à ce théâtre. C'est un événement rare et une occasion unique que d'écouter des chansons qu'on croyait perdues.