L'installation de deux consortiums dédiés à l'exportation, le renforcement des capacités de l'Algex, ainsi que l'organisation prochainement des assises nationales sur les exportations sont autant d'évènements présageant la volonté de l'Etat de booster les exportations hors hydrocarbures. Cependant, économistes et patronat s'accordent à dire que les efforts des pouvoirs publics seront sans effet sans la préservation et le développement de l'appareil productif national. Ils convergent également sur la nécessité de libérer les initiatives. La Confédération algérienne du patronat (CAP) estime que pour prétendre renforcer les exportations hors hydrocarbures, il faut d'abord qu'il y ait une production en quantité et surtout en qualité. Pour y arriver, il est impératif, selon la CAP, d'améliorer la productivité. Son président, Boualem M'Rakeche, a affirmé qu'il revient aux pouvoirs publics de créer les conditions adéquates et dans ce sillage lever les obstacles pour atteindre cet objectif. La CAP estime que les pouvoirs publics doivent accompagner les opérateurs économiques dans cette démarche en libérant les initiatives et en facilitant l'acte d'investissement, ainsi que l'accès au financement. Le système financier doit être, a-t-il recommandé, plus souple. Idem pour l'accès au foncier. D'après M'Rakeche, l'Algérie recèle des potentialités, sauf que ce sont, selon lui, les conditions à même de booster les exportations qui font défaut. Il va sans dire que les pouvoirs publics doivent instaurer un code d'éthique qu'ils signeront avec les opérateurs économiques, lequel devra « appuyer la contribution de tout un chacun qui s'inscrit dans la préservation de l'intérêt national » et d'ajouter dans le même contexte : « nous devons mettre en place des mécanismes à même d'assurer un circuit normal à l'exportation, loin de tout obstacle, notamment, d'ordre administratif ». Le président de la Confédération des industriels et producteurs algériens (Cipa), Abdelaziz Mehenni, n'a pas manqué de « dénoncer » la situation du statuquo dans laquelle vivent actuellement les entreprises nationales de production. « Exporter quoi ? », s'est-il interrogé. D'après lui, la question ne mérite même pas d'être posée pour la simple raison« que nous n'avons rien à exporter en dehors des hydrocarbures ». Zones industrielles ou ports secs ? Il suffit seulement, a-t-il souligné, de voir les zones industrielles pour que le constat soit vite établi. « Les zones industrielles sont devenues des ports secs », a-t-il avancé. Il a ajouté qu'avant de penser à aller vers les marchés internationaux, le plus approprié est « de dégager des mesures pour lutter contre le bazar qui envahit notre économie ». Cette situation « nous mène tout droit vers le FMI, autrement dit vers un nouveau cycle d'endettement », a-t-il affirmé avant d'enchaîner : « nous exportons du travail, en parallèle nous importons du chômage ». Mehenni a affirmé qu'il faudrait, en premier lieu, sauvegarder la production nationale, l'outil de production et répondre à la demande nationale. « Nous importons des produits qui sont fabriqués chez nous », a-t-il déploré soulignant qu'il est impératif de mettre un terme à ce qu'il qualifie « d'importation anarchique ». Rejoignant l'UGTA, le président de la CIPA prône l'instauration d'une licence d'autorisation pour importation et même pour l'exportation. Il cite à titre indicatif « l'exportation des déchets de papier » alors que « les besoins du marché national ne sont pas couverts ». L'exportation illicite est également à éradiquer, a-t-il noté avant d'ajouter que « la peau de mouton est exportée alors que plus de 17 tanneries nationales sont à l'arrêt ». Se mettre aux normes internationales La question de relancer les exportations hors hydrocarbures n'est pas nouvelle, selon les experts en économie. « Cela fait 30 ans que nous parlons de renforcer les exportations, or, depuis, il n'y a pas eu de progrès significatif en termes de production », a fait remarquer Mustapha Mekidèche, tout en précisant que « ce qui est recommandé en premier lieu est de relancer l'appareil productif et de poursuivre les efforts engagés pour la ré- industrialisation de l'outil productif. » Il est vrai que les pouvoirs publics, a-t-il indiqué, « ont mis en place des mesures de nature à diversifier l'économie » mais il est nécessaire, de son point de vue, de faciliter l'acte d'investir en améliorant le climat des affaires et l'environnement économique d'une manière générale. Pour Mekidèche, les entreprises algériennes doivent être compétitives pour pouvoir se frayer un chemin sur les marchés internationaux. « Il y a des ouvertures et des opportunités, notamment, au niveau des pays africains à saisir », a-t-il souligné. Pour sa part, Mourad Goumiri, expert en économie, a soutenu qu'il est impératif de mettre en place une stratégie sur la base d'une vision globale tracée sur le long terme. « Nous devons cibler d'abord les pays et les secteurs comme nous devons assurer la traçabilité de nos produits », a-t-il dit avant d'ajouter que ce créneau inhérent à l'exportation « est à construire ». Comment ? « D'abord en se mettant aux normes internationales », a-t-il plaidé avant de préciser qu'il faudrait également engager des mécanismes de lutte contre l'exportation illicite.