Si dans la campagne les familles font généralement le rituel du sacrifice chez elles, des citadins recourent, pour diverses raisons, aux bouchers. Une sorte d'abattoirs temporaires (re)font surface en cette occasion de l'Aïd El Adha, au niveau de nos villes. Cette année, dans bon nombre de quartiers, le phénomène a été de mise. A Alger, comme partout dans les agglomérations, des petites tables bien équipées servant d'outil pour la découpe sont visibles. Au quartier du pont des Fusillés dans la circonscription de Hussein Dey, précisément au niveau de l'abattoir municipal, le gros des bouchers «occasionnels» y est présent. Tôt dans la matinée d'hier, les retardataires se sont rendus sur les lieux pour sacrifier leurs moutons et d'autres sont venus à la recherche d'une main habile pour découper la carcasse de la bête sacrifiée hier. Une dizaine de «pseudos» bouchers ont dressé leurs tables aux alentours de l'abattoir. «Nous avons pris l'habitude de nous installer ici à chaque occasion de l'Aïd depuis quelques années. Ça nous permet de gagner un peu d'argent en contrepartie de notre travail, nous demandons 800 DA», indique le jeune Omar, la trentaine passée. Omar est de profession boucher, «hérité de père en fils», dit-il, localisé au quartier des Anassers. Il a installé une table qu'il partage avec son frère Ahmed. Celui-ci s'occupe, quant à lui, du nettoyage de la tête et des pattes de l'animal à l'aide de bouteille de gaz butane et chalumeau. Ce magasin de fortune dispose de tout ce qu'on observe dans des boucheries ordinaires : haches de boucher, scies, couteaux, câbles… Contrairement à Omar et son frère qui sont des bouchers originels, d'autres personnes se sont reconverties en bouchers de circonstance. C'est le cas, par exemple, de ces deux amis qui attestent que «nous ne sommes pas des bouchers mais nous avons un savoir-faire en la matière. Nous faisons pratiquement tout». «Nous ne sommes pas ici pour le seul but de gagner de l'argent mais beaucoup plus pour aider les gens à faire leurs sacrifices, car nous égorgeons et décapitons des moutons même pour ceux qui ne sont pas en mesure de payer nos services», enchaîne-t-on. Ils sont, en effet, nombreux ceux qui se rendent sur les lieux. «Sincèrement, en dépit de mon âge avancé, je n'ai jamais fait le sacrifice par moi-même. Ce n'est pas le savoir-faire qui fait défaut mais plutôt le courage. Voilà donc pourquoi je préfère me rendre ici», indique M. Achour, sexagénaire, habitant le quartier de Ruisseau. Le manque du savoir-faire ou courage ne sont pas les seules raisons qui motivent les citadins à faire leurs sacrifices dans des abattoirs. Un père de famille, la soixantaine passée, avance d'autres raisons : «Comment voulez-vous faire le sacrifice chez moi alors que j'habite un F3 au 4e étage. Où voulez-vous que j'égorge le mouton ? J'avoue que je regrette de l'avoir acheté deux jours avant l'Aïd, car le mouton est resté depuis à la cage d'escalier de l'immeuble». L'essentiel, pour ce père de famille, dit-il, est de faire la sunna du prophète (QSSSL) et faire bonheur aux enfants, visibles en bon nombre d'ailleurs sur les lieux.