« Il y a eu impunité. Il n'y a eu ni reconnaissance ni indemnisations. Ce dossier est toujours à la traîne », a lâché Abdelhamid Selakdji, président de la Fondation du 8 Mai 1945. Ainsi, depuis « le petit pas » franchi en 2012 par le président François Hollande en matière de reconnaissance des crimes perpétrés par la France coloniale, « rien n'a été fait dans le sens d'une réelle reconnaissance des souffrances endurées par le peuple algérien durant cette période », a-t-il regretté. Seule une partie de la société civile française a entrepris, selon lui, quelques démarches et actions pour « faire pression sur l'Etat français pour obtenir cette reconnaissance officielle » des massacres du 8 Mai 45. A ce jour, les déclarations des officiels français ne sont pas suivis d'actes. « Les déclarations de François Hollande constituent un petit pas vers la reconnaissance officielle de ces crimes contre l'humanité commis par l'armée française durant la période coloniale. C'est un geste plutôt diplomatique de la part de la France qui a pour objectif d'apaiser les esprits en vue de conclure des contrats commerciaux juteux », a indiqué notre interlocuteur, précisant que le président français « a reconnu les souffrances endurées par le peuple algérien, mais pas les crimes commis ». Ce dossier brûlant dans les relations entre l'Algérie et la France avance à pas timides en l'absence de volonté politique. Deux ambassadeurs français à Alger avaient, en 2005 et 2006, qualifié ces crimes de « faute », puis de « faute inexcusable ». « Aucun responsable français ne veut prononcer le mot crime pour qualifier les meurtres et les massacres commis par la France coloniale contre les Algériens », a-t-il fait remarquer. La fondation n'est pas contre « le rapprochement entre les deux pays » mais met en avant « la nécessaire lutte contre l'oubli et l'impunité ». D'autant qu'il s'agit d'un massacre contre l'humanité reconnu par le monde entier. « Ce sont des crimes perpétrés par des institutions officielles et au nom de la République française et non pas par des groupes d'individus », a-t-il indiqué. En qualifiant la loi glorifiant le colonialisme votée par le parlement français en 2005 « de véritable insulte » pour le peuple algérien, Abdelhamid Selakdji appelle les institutions algériennes à élaborer « une loi criminalisant le colonialisme français ». C'est d'ailleurs une action qui doit être menée par plusieurs pays victimes du colonialisme français afin « d'atteindre l'objectif de l'abolition du colonialisme comme cela a été fait pour l'esclavagisme ». En rappelant que la France d'aujourd'hui est responsable de son passé, il appelle à une action concrète. « Il est grand temps de reconnaître ces massacres contre le peuple algérien pour une relation privilégiée entre les deux pays. » Le nombre des victimes de ces massacres fait encore l'objet de recherche, vu le « verrouillage des archives militaires et le nettoiement des archives civiles françaises ». « Le nombre de victimes est estimé à 45.000. Nous sommes en train de travailler sur les témoignages des personnes encore en vie, les enregistrements, et les mémoires des militaires français qui disent autre chose que les rapports remis à leurs supérieurs », a conclu notre interlocuteur.