Hamid Nacer Khodja s'est éteint, dans la nuit de vendredi à samedi, à Djelfa où il résidait depuis de nombreuses années. Enarque de formation, originaire de Lakhdaria, il s'était retrouvé après une carrière administrative notamment dans la région des Aurès, enseignant dans cette cité des Hauts-Plateaux. Il a été nommé responsable du département des langues étrangères à l'université mais sa passion était surtout la recherche digne d'un bénédictin. Longtemps, ce féru de poésie et de littérature s'est consacré aux travaux de collecte et d'analyse minutieux sur le poète Jean Sénac. Dans son domicile, dans une cité populaire, ses armoires débordaient de documents sur le parcours de l'homme et la vie culturelle. Personne n'était mieux indiqué pour dénicher un manuscrit, une photo au curieux de passage qu'il recevait avec amabilité et générosité. Il avait côtoyé Sénac, l'artiste peintre Martinez, Tibouchi et Jean Dejeux dans les années 70, du temps où il taquinait la muse. Il figurera d'ailleurs aux cotés de Laghouati Sebti, Skif et d'autres dans une célèbre anthologie que le poète consacre en 1971 à la jeune poésie algérienne. Sa passion de la recherche qui a sans doute grevé sa production prendra forme avec la publication de nombreux livres notamment, « Jean Sénac », « Visages d'Algérie », « Ecrits sur l'art », « Pour une terre possible » et « Tombeau pour Jean Sénac ». Dans chacun, il a recueilli avec un souci d'exactitude des textes critiques et poésies parfois inédites du poète assassiné en 1973. Il était un des meilleurs connaisseurs de la vie culturelle de la période coloniale dont il pouvait exhumer la revue la plus éphémère ou le texte de Dib ou de Feraoun le moins connu. On lui doit notamment d'avoir réuni en 1999 tous les recueils publiés de Sénac dans un épais volume critique, ainsi que d'un récit (« Albert Camus, Jean Sénac, ou le fils rebelle » 2000, « Jumeaux », 2012,). Ses contributions critiques dans la presse et les colloques universitaires ont fait de lui le spécialiste attiré du poète qui avait animé des émissions de poésies à la Radio et aidé de nombreux jeunes. Ces dernières années, il est redevenu familier de plusieurs manifestations culturelles. Il était familier du Sila, invité à des colloques et a pris en charge durant quelques mois la revue Livresque. Ses nombreuses publications dans la presse nationale ont toujours témoigné de son souci de restituer avec minutie ces années où l'Algérie a suscité de nombreux écrits. Il faisait partie aussi du jury du festival du film amazigh. « Tahar Djaout, une mémoire mise en signes », « Ecrits sur l'art », ensemble de textes réunis par Michel-Georges Bernard (El Kalima 2013) est le dernier ouvrage qu'il a préfacé, en signe d'amitié à Tahar Djaout. Sa mort et celle de tant d'amis l'avaient affecté et toutes ses recherches visaient à perpétuer une sorte d'Algérie éternelle qu'il persistait à aimer et à célébrer envers et contre tous.