Au bout de l'offensive lancée le 15 novembre, le contrôle de 93% des quartiers pose la question désormais inévitable de l'après-Alep. Si Damas et son allié russe conditionnent l'arrêt de l'offensive par le départ de tous « les bandits », en allusion aux groupes armés pratiquement défaits, le forcing du camp occidental et de leurs alliés régionaux tente de sauver la mise dans cette bataille décisive aux conséquences importantes sur l'équilibre régional. Quelques heures avant une réunion « technique » américano-russe à Genève, destinée à relancer les discussions sur « le cessez-le-feu, une aide humanitaire et un départ de l'opposition et des civils d'Alep », selon le département d'Etat, une rencontre des dix pays occidentaux et arabes, de la Turquie et de l'Union européenne, se déroule à Paris. Elle abordera aussi la pire catastrophe depuis la Seconde Guerre mondiale. A l'Onu, l'Assemblée générale a précédemment adopté à une large majorité une résolution demandant une « cessation complète de toutes les attaques contre des civils » en Syrie et appelant à la levée des sièges avec un « accès humanitaire rapide, sûr, prolongé, sans entrave et inconditionnel ». La guerre en Syrie, marquée par les rivalités persistantes entre les Etats-Unis et la Russie, l'implication des puissances régionales et la montée en puissance des mouvements terroristes dominés par le groupe Daech, révèle le scénario de la partition qui, selon le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Marc Ayrault, se profile à l'horizon. Dans le viseur des troupes de Bachar El Assad, la reconquête d'Idleb (nord-ouest) encore contrôlée par le groupe Fateh al-Cham, reste une priorité majeure, alors que le camp occidental se prédestine au combat contre Daech présenté par le nouveau président élu, Donald Trump, comme le principal défi de nature à sceller le rapprochement avec la Russie. A tout le moins, la victoire définitive de Damas, conforté par le basculement du rapport de force, n'est pas encore validée par Kerry. « Même si Alep tombe, cela ne changera pas la complexité fondamentale de ce conflit », martèle John Kerry qui se déclare préoccupé par la persistance de la « menace terroriste ». De ce fait, au moment même où les tractations se poursuivent sur l'avenir d'Alep, le secrétaire américain à la Défense, Ashton Carter, a annoncé le déploiement en Syrie de 200 soldats supplémentaires, incluant des forces spéciales, des formateurs, des conseil-lers et des équipes d'experts en explosifs, en soutien aux 300 soldats américains déjà en Syrie pour conseiller la coalition arabo-kurde des Forces démocratiques syriennes (FDS) en lutte contre Daech à Raqqa. Devant les participants au forum, organisé par l'Institut international des études stratégiques, le secrétaire d'Etat à la Défense a précisé que « Washington cherche à empêcher Daech de trouver un sanctuaire au-delà de Raqqa ».