Du fait que les dossiers traînent au niveau des cours de justice, les expulsions se comptent sur le bout des doigts. Des familles sont expulsées de leurs logements par décision de justice pour des raisons diverses : impayés de loyer, restitution par le propriétaire d'un logement loué ou cédé amicalement. Ces familles qui occupaient des logements relevant du secteur public et privé se retrouvent ainsi, du jour au lendemain, dans la rue faute d'un logis de rechange. Cette situation est souvent vécue comme une humiliation. Une situation fort embarrassante que les chefs de familles n'arrivent pas à gérer facilement étant donné la difficulté de trouver un hébergement d'urgence. En effet, beaucoup de chefs de familles après avoir occupé un logement, pendant des années, quittent les lieux sans ménagement. Les images désolantes de familles sans toit qu'on voit un peu partout dans la capitale et ailleurs montrent on ne peut plus l'impuissance pour ces citoyens de trouver promptement un abri qui préserve leur dignité et leur honneur. Que de fois les familles expulsées se retrouvent avec des affaires entassées dans un coin de rue ou d'un immeuble, des meubles démontés confiés à des amis ou à des proches parents gardant le strict minimum en attendant un hypothétique relogement ou une solution au problème. Que prévoit la loi en cas d'expulsion ? Pour maître Mahoud Zertal, l'un des premiers avocats inscrits au barreau d'Alger, agréé auprès de la cour suprême : « Il faut une équité pour le propriétaire et l'expulsé. Pour ce dernier, l'Etat a la responsabilité de le loger au même titre que tous les citoyens, comme il est prescrit dans la Constitution. «C'est inhumain de laisser les personnes âgées et les enfants dans la rue en proie à tous les dangers» dit-il. Plus explicite, maître Fatima Benbraham affirme que l'ordonnance du juge des référés est exécutoire et définitive à la faveur de l'article 331 du nouveau code civil applicable à partir du 1er avril de l'année en cours. Mais, pour cette spécialiste en droit : «La justice doit être avant tout humaine et non expéditive lésant l'une ou l'autre des deux parties en conflit ». Au niveau du ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme, l'on nous fait savoir que les expulsions des logements sociaux locatifs (LSL) ou des logements sociaux participatifs (LSP) réalisés et gérés par les Offices de Promotion et de Gestion Immobilière (OPGI) sont soumises à la justice. Cette dernière doit statuer sur le cas des personnes qui ne payent pas le loyer. Avant la remise des clés, le bénéficiaire du logement doit signer un contrat de location dans lequel sont mentionnés les droits et obligations du locataire dont le payement mensuel du loyer. « A l'heure actuelle, dira M. Amar Belhadj Aissa, directeur de la gestion immobilière au niveau du ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme, le taux de recouvrement des loyers est de 35% seulement à l'échelle nationale ». « Ce taux, confirmera-t-il, n'a pas évolué depuis 2002». LA JUSTICE TRANCHE LES CAS LITIGIEUX Au bout de la troisième mise en demeure si le locataire ne paye pas le loyer, son dossier est envoyé automatiquement au service contentieux. Ce dernier fait intervenir la justice qui doit trancher. Toutefois, au niveau de cette institution, les dossiers de non payement des impayés de loyers ne se comptent plus. Du fait que les dossiers traînent au niveau des cours de justice, les expulsions se comptent ainsi sur le bout des doigts», affirme le directeur. Il évoque l'exemple d'un cas d'expulsion à Tamanrasset : «Il y a quelques années, un locataire qui n'avait pas payé ses loyers durant une décennie a été expulsé par un huissier de justice. Il a habité sous une tente durant deux semaines. Pendant ce temps, tous les locataires qui avaient des arriérés de payement de loyer se sont vite précipités vers les guichets de l'OPGI pour s'acquitter de leurs créances. «Cette décision de justice a été salutaire un effet boule de neige sur les autres», dira M. Belhadj Aissa. Dans certains cas de non payement, le recours à la justice ne se fait pas directement, d'après notre interlocuteur. «Dans un premier temps, un calendrier d'acquittement est établi pour le citoyen dont le revenu est très bas», a déclaré ce responsable. Mais dans la majorité des cas, les dossiers sont transmis à la justice. Alors que dans d'autres cas, l'expulsion est soumise à l'avis du wali qui accorde un délai minimum de trois mois ou plus et le juge attend cet avis qui, généralement, tarde à venir et l'affaire reste pendante. D'ailleurs, l'une des missions des Directions générales des OPGI est d'assigner en justice les locataires récalcitrants. L'autre cas où l'OPGI peut sévir sans ménagement est la sous-location, lorsque le service concerné s'assure que le locataire qui occupe le logement a loué à une tierce personne. Dans ce cas, aussi bien le locataire que le «squatter» sont assignés en justice et l'expulsion est exécutée avec le concours de la gendarmerie nationale et le wali. A propos du relogement des expulsés dans des chalets, ce responsable affirme que cette mission échoit au ministère de la Solidarité nationale qui doit prendre le relais pour trouver une solution aux familles expulsées. INCESSIBILITÉ DES LOGEMENTS DE FONCTION Les logements de fonction ne sont pas cessibles quelle que soit leur origine, conformément à la dernière instruction du chef du gouvernement n° 364 du 20 juillet 2009. Toutefois, la loi 89-10 prend en compte deux catégories de logements de fonction. La première concerne les logements qui sont incessibles tandis que la deuxième liste comprend les logements situés à l'extérieur de l'enceinte des institutions étatiques. Ces derniers sont cessibles mais à condition que l'administration se désiste. Le logement est alors acheté dans le cadre de la loi 81-01. Mais, cette dernière a été abrogée et remplacée par le décret exécutif n° 03-269 du 7 août 2003 qui interdit la cession des logements de fonction et fixant les conditions ainsi que les modalités des biens immobiliers appartenant à l'Etat et à l'OPGI réceptionnés ou mis en exploitation avant janvier 2004.