Alif Naaba, ce jeune artiste burkinabé, chantera ce soir (19h) à la salle El Mouggar, à l'initiative du Centre culturel français d'Alger (CCF) en collaboration avec l'Office national pour la culture et l'information (ONCI). Jeune et ambitieux, cet artiste est considéré comme la nouvelle figure de la chanson africaine, qui, avec une musique «recherchée» et «unique», est fraîchement introduit dans le circuit artistique. Cet artiste burkinabé est bel et bien présent, pour la première fois à Alger. C'est avec sincérité et humilité qu'il a accepté de nous accorder cet entretien en exclusivité. Quelle est la situation de la musique africaine dans le monde ? La musique africaine se trouve dans une phase très difficile à cause de la piraterie et du fait aussi que les politiques culturelles des pays africains ne sont pas accordées et synchronisées comme il se doit. La musique africaine représente également une puissance pour transmettre des messages forts au monde et démontrer que l'Afrique ne se résume pas uniquement en la misère, pauvreté et maladies. Vos sources d'inspirations s'appuient-elles sur l'Afrique profonde ? Indubitablement. Mais je dois dire que je me suis beaucoup inspiré dans mes chansons de ma culture, celle de mon pays, le Burkina Faso. En même temps, ma musique épouse harmonieusement toutes les cultures du globe terrestre. Parlez-nous de vos créations musicales, de votre palmarès et de vos tournées… J'en suis à mes débuts artistiques, la preuve je viens de faire sortir mon troisième album. Il est vrai que j'ai obtenu plusieurs prix, en l'occurrence : le meilleur album de la diaspora 2006, kundé du public 2006, meilleure chanson francophone avec le titre «Enfin ce soir», clip d'or 2006. Afin de promouvoir mes albums, j'effectue une tournée à travers plusieurs pays. Votre éducation au sein de votre famille a été prépondérante dans vos débuts dans la chanson, votre maman y a joué un grand rôle, parlez-nous de cela ? Je considère ma mère comme mon carburant, mon médecin, mon professeur, mon guide… c'est grâce à elle que je suis ce que je suis maintenant. J'ai été élevé par une mère chansonnière traditionnelle, j'ai été bercé, dès mon jeune âge par cette musique qui parle si bien d'amour, d'émotions, d'intimité et d'espoir. Je suis veinard d'avoir reçu cet héritage immatériel et inégalable. Que pensez-vous de l'influence de la culture musicale africaine dans les genres musicaux des pays occidentaux ? La musique africaine a démontré beaucoup de choses. Nos aïeux ont su et pu apporter cette autre image sur ce continent. Aujourd'hui, la plupart des artistes reviennent à la musique africaine à l'image du chanteur «M», Michael Jackson, Amadou et Mariam et beaucoup d'autres. Pour moi, l'avenir réside en Afrique. Considérez-vous votre genre musical comme une école dans laquelle probablement des artistes adopteraient votre style ? Je réitère que je suis encore novice, toutefois, il y a des jeunes artistes burkinabés (Floppy, Patrick), qui excellent dans le même genre musical que moi. C'est magnifique, cela prouve que j'ai pu, à travers mes textes et mes rythmes, faire passer des émotions. Le choix de vos musiciens ? Vous accompagnent-ils toujours ? Oui pour la plupart. Ce ne sont pas seulement mes musiciens mais de vrais amis de longue date. Nous avons tissé des liens très forts. Vos impressions sur votre première visite à Alger ? Il fait beau mais frais. Les gens sont affables et courtois. Il y a trop de monde dehors. Mais on dit souvent que la force d'un peuple demeure dans son nombre, comme c'est le cas de la Chine. Les maisons sont peintes en blanc alors que chez nous, les domiciles sont en rouge. J'adore ce site, je souhaiterais revenir bientôt. Alif Naaba, votre nom a-t-il une signification particulière étant donné que c'est la première lettre de l'alphabet arabe ? Exactement. Alif Naaba signifie premier prince. Est-ce que la religion musulmane vous a influencé dans votre parcours artistique ? La religion musulmane est mon socle. L'exercice de la musique pourra-t-elle vous mener un jour à écrire un livre, à être un comédien au théâtre ou acteur au cinéma ? Il est vrai que j'ai un grand penchant pour le théâtre. J'ai, d'ailleurs, participé dernièrement en tant que directeur artistique à une comédie musicale qui traite le thème du 15e anniversaire du génocide rwandais. J'ai travaillé également dans un spectacle chorégraphique. J'aime bien m'ouvrir à toute forme d'art. La musique algérienne est riche et diversifiée, avez-vous des connaissances dans ce domaine ? D'emblée, je réponds Khaled, Cheb Mami, Hasni et dernièrement j'ai découvert le talent d'un jeune groupe algérien. Cette formation a participé à un festival de jazz tenu à Ouagadougou (capitale du Burkina Faso), il s'agit de Djmaoui Africa. J'ai beaucoup aimé. L'Algérie vient d'organiser une très importante rencontre sur la vie actuelle et artistique du continent africain. Il s'agit du 2e festival panafricain, en avez-vous eu des échos ? Evidemment. Je dois dire que ce festival était un réel succès pour l'Algérie qui a pu, en dépit des contraintes, réunir autant d'artistes africains, assoiffés de rencontres de qualité dans un même espace. C'était un festival excellent, les artistes africains ont pu se rencontrer et tisser des liens pour le bien de la culture africaine. Cet événement a permis à plusieurs artistes de découvrir un si beau pays et des gens formidables. Ainsi, cette renaissance en termes culturels a permis à l'Afrique, de vibrer au son d'un seul battement de cœur, celui de notre cher continent. Je dois mettre, également en exergue l'hospitalité formidable et l'organisation exemplaire de cette manifestation d'envergure de la jeunesse algérienne et africaine, qui a su relever le défi en contribuant au succès de cet évènement continental. En bref, la seconde édition du Festival culturel panafricain a permis à l'Algérie et à ses hôtes de vibrer 15 jours durant, au rythme de la culture africaine dans toute sa richesse et sa diversité. D'autres projets en perspective ? Je compte faire la promotion de mon troisième opus intitulé «Wakat», qui comprend 12 titres, sorti en mars dernier, édité par «Saydouni productions». Cet album est réalisé sur des sonorités effectuées sur percussions et cordes. Dans cet album, je parle aussi bien d'amour, du pardon et de l'incapacité des femmes à enfanter. D'autres dates ? Nous donnerons des concerts le 27 novembre à Ouagadougou, en décembre à Abidjan, au mois de janvier aux Etats-Unis puis au Rwanda. En été, nous effectuerons inchallah une tournée en Europe. S. S.