Le dynamisme de la presse oranaise ne s'explique pas seulement par une tradition bien enracinée. Les milieux économiques et d'affaires dans la région se sont vite engouffrés dans le domaine. Aujourd'hui, la meilleure carte de visite pour un industriel est de posséder un journal. Le dernier en date des quotidiens, Algérie Presse qui n'a pas encore bouclé quarante numéros appartient à Mohamed Yazid Bambrik. Une savoureuse anecdote court d'ailleurs à Oran. Le titre est bien choisi car le directeur de la publication est le propriétaire de la marque de …café le Centaure. Alors de l'expresso à express le pas a été vite franchi. Cette implication d'une fortune n'est pas la première expérience. La naissance du Quotidien d'Oran en 1994 est le résultat de cet intérêt pour la presse de la part des hommes d'affaires sollicités notamment par l'ex ministre de la justice M Mahi Bahi. Habib Bensaber fut ainsi le premier industriel à s'impliquer dans le projet lancé par le journaliste M Benabbou. La SPA compte de nos jours une cinquantaine d'actionnaires dont des noms connus comme Bensadoun, Cherif Othmane. Le mouvement ne s'est pas arrêté depuis. Il est depuis rare de trouver derrière un journal un simple professionnel. Il n'y a pas eu de journaux dont les fondateurs et propriétaires seraient uniquement des journalistes. A l'exception du patriote et d'El Watani de Ouasti. Les plumes connues à Oran se sont soient exilés (Zahraoui, Bouziane Khodja, Djemai ….) ou collaborent à d'autres titres (Benachour, Mohammedi, Brahim Hadj Slimane ….) De nouveaux noms ont surgi à l'instar de Hadj Ahmed Lazreg de l'APW de Mostaganem qui fut à l'origine de la naissance de Carrefour. On connait aussi l'expérience de Youssef Djebbari l'ex président du MCO. Il était davantage connu comme promoteur immobilier que patron de presse. Aujourd'hui, il est à la tète d'un titre «l'écho d'Oran » qui se décline même en hebdomadaire sportif. Mahi Moussa Saïd était fromager et El Adjwa a été une initiative du responsable de Peugeot. Beaucoup déplorent cette arrivée massive des «affairistes» dans le journalisme. Avec le «vagabondage» des jeunes journalistes qui préfèrent écrire dans plusieurs titres à une place stable constituent le talon d'Achille de notre profession » nous dit un d'entre eux. Cela aboutit parfois à des situations cocasses comme celle que nous raconte ce confrère. « J'ai rédigé un article sur 15 000 policiers qui doivent assurer la sécurité du GNL. Un confrère d'un grand titre reprend l'info en diminuant le nombre de mille. Pourquoi 14 000 lui dis je ? Sinon le plagiat aurait été trop flagrant a-t-il reconnu ». Rien de mieux pour servir, fortifier et soutenir une carrière politique qu'un journal. Taieb Mehiaoui qui vient d'être élu au Conseil de la nation sous l'étiquette du RND est aussi le directeur général d'El Oumma El Arabia. Seule la voix de l'Oranie semble échapper à cette mainmise des pouvoirs économiques. Ghalem Abdou son fondateur provient de l'université. En soi, ce n'est nullement un inconvénient de constater que des fortunes se lancent dans des entreprises de presse. Sous tous les cieux ,les détenteurs de capitaux jettent leur dévolu sur le secteur dont la valeur marchande ne cesse de prendre de l'ampleur. Le risque est certes calculé et la prudence est de règle. Avec deux ou trois pages de publicité quotidiennement, un journal peut continuer à paraître. Les fonds à engager dans l'audiovisuel qui ne semblent encore n'attirer personne. Le garde fou est que ces bailleurs de fonds ne se substituent pas à ceux qui écrivent. L'inversion des rôles risque de discréditer davantage le métier.