Rappel n Ceux qui ont assisté au Panaf-1969 s'en souviennent comme d'un événement épique et historique. Epique, parce qu'il s'agissait d'une aventure culturelle : réunir tous les Africains autour de leur culture. Historique, parce que le festival était placé sous le signe des mouvements de libération et de luttes pour les indépendances. Le contexte social et politique de l'époque déterminait et esquissait les contours du premier Festival panafricain ; celui-ci était hissé par des discours révolutionnaires. Alger, le temps d'un festival, devenait le forum des révolutionnaires, une tribune pour les revendications légitimes des peuples opprimés. Et l'Algérie, militante invétérée des libertés du continent noir et des droits de ses peuples, d'autant plus qu'elle célébrait le septième anniversaire de son indépendance, réitérait aussi bien indiscutablement qu'inconditionnellement son engagement en faveur des mouvements de libération et de toutes formes de lutte tant contre les dominations coloniales que contre les discriminations raciales. Le Panaf était l'incarnation des élans révolutionnaires et de la liesse populaire. Il illustrait manifestement cette réalité, cette exaltation populaire et ce culte pour l'esprit révolutionnaire. Car le continent noir endurait encore le colonialisme à l'exemple du Congo et subissait la ségrégation raciale en Afrique du Sud avec l'apartheid. Et le Panaf était une occasion pour dénoncer l'impérialisme aussi bien colonial qu'occidental et revendiquer aussi bien les indépendances des pays encore sous le joug du colonialisme que les droits civiques des pays comme victimes du racisme, combat auquel elle adhérait avec une conviction profonde. C'était un moment grandiose où s'était forgée une conscience politique nouvelle. Et la culture en était le véhicule, un moyen de mobilisation pour tous ces mouvements de libération. D'ailleurs, les leaders et militants de ces mouvements avaient, l'instant du festival, délégué tous leurs représentants à Alger, affectueusement appelée par les Africains «Mama Africa». La culture devenait alors un instrument de mobilisation pour tout peuple opprimé. Même les Afro-Américains, à savoir les Black-Panthers, étaient, dit-on, concernés par le Panaf auquel ils s'identifiaient. Puisqu'ils partageaient la même réalité sociale, à savoir la discrimination raciale. Le Festival panafricain 1969 a révélé que l'indépendance de l'Algérie et son esprit révolutionnaire avaient forgé une nouvelle conscience politique en Afrique, tout comme au sein des communautés afro-américaines. Elle avait sensiblement influencé l'action des mouvements impliqués dans la lutte pour l'indépendance et le militantisme en faveur des droits civiques, notamment en Afrique du Sud et aux Etats-Unis.