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Histoires vraies
Mesrine, la vedette (1re partie)
Publié dans Info Soir le 29 - 07 - 2009

Il voulait faire parler de lui et il a été le premier en France à utiliser les médias modernes pour y parvenir, d'où une célébrité énorme et un nom qui, aujourd'hui encore, dit quelque chose au public. Il n'a pas été le bandit le plus redoutable ni le plus sanglant du siècle, mais il a été l'un des plus manipulateurs. Et il a certainement obtenu ce qu'il voulait : le vedettariat et une fin aussi tragique que spectaculaire.
Jacques Mesrine est issu d'un milieu aisé. Il naît le 28 décembre 1936 à Clichy, de parents marchands de tissus. Son enfance se déroule sans incident majeur, à part l'absence de son père, prisonnier pendant toute la durée de la guerre, de 1940 à 1945. Ses parents ont de grandes ambitions pour lui. Ils voudraient qu'il fasse HEC et qu'il se lance dans les affaires. Malheureusement, il n'est ni doué pour les études ni intéressé par elles. Il est d'abord placé chez les oratoriens, qui finissent par le renvoyer pour mauvaise conduite. On l'inscrit alors dans un lycée, mais il gifle le proviseur. Un séjour en établissement technique n'est pas plus heureux : il ne tient que six mois.
Ses parents doivent s'y résoudre : Jacques ne fera pas HEC, il n'aura même pas son bac. Son père le retire de l'école et le fait entrer, alors qu'il a seize ans, comme représentant dans le magasin de tissus d'un de ses amis. Là encore, il ne reste pas longtemps. Mais les relations paternelles continuent à jouer et le voilà représentant ailleurs. A dix-huit ans, il se marie avec une Africaine et vivote avec elle dans le Quartier latin jusqu'en 1957, date à laquelle il part pour l'Algérie.
Il y reste vingt-huit mois et, à la différence de beaucoup d'autres, il y passe des moments heureux. Il a le goût de l'action et se découvre la passion des armes. Il se montre un bon soldat, discipliné et courageux, ce qui lui vaut la croix de la Valeur militaire. Cela ne l'empêchera pas, plus tard, dans sa biographie L 'Instinct de mort, écrite en prison en 1975, de rendre cette période algérienne responsable de sa dérive vers le crime.
Développant une idéologie de circonstance, il masque sous des dehors politiques son passage à la délinquance. «Au nom de quoi m'avait-on donné le droit de tuer des hommes qui auraient pu devenir des amis ? Cette société s'était servie de moi comme d'un pion, profitant de ma jeunesse pour faire un bon tueur. Désormais, j'allais donc m'attaquer à elle pour lui faire payer le prix de ce qu'elle avait détruit en moi. Je me suicidais socialement.» En fait, à son retour en France, c'est plus aux débuts d'un petit malfrat qu'on assiste qu'à l'explosion d'un desperado. Il divorce et retrouve encore une fois une place de représentant dans le textile, grâce à son père. Encore une fois, il n'y reste que quelques mois, mais son père en a alors assez et se fâche. Jacques Mesrine s'installe dans un petit hôtel du Quartier latin, où il subsiste tant bien que mal, en vendant des journaux et en travaillant aux Halles.
Il a vingt-quatre ans et il prend l'habitude de se promener armé. Il s'est inscrit dans divers cercles de jeu de la capitale, qu'il fréquente assidûment. Il a également une vie sentimentale agitée... Les femmes et le jeu, tout cela coûte cher, alors il commet de petits braquages de temps en temps. Mais l'irréparable n'est pas commis, d'autant qu'il a la chance de ne pas se faire prendre.
En 1961, il fait un mariage d'amour avec une Espagnole, Maria de Soledad, qui lui donnera trois enfants, dont sa fille préférée, Sabrina. C'est aussi en 1961 qu'il est arrêté pour la première fois, pour port d'armes, au cours d'un contrôle de routine. La justice est indulgente, il n'est condamné qu'à 300 francs d'amende. Mais l'année suivante il est de nouveau arrêté, toujours à un contrôle, au volant d'une voiture, en compagnie de trois complices.
Dans le coffre, il y a un véritable arsenal et, cette fois, pas question de s'en sortir avec une simple amende. Après un interrogatoire serré, Jacques Mesrine finit par avouer un cambriolage commis l'année précédente. La sanction tombe : dix-huit mois de prison ferme. A sa sortie, Maria de Soledad est là qui l'attend et, sous son influence, il décide de devenir honnête. Contrairement à ce qu'il affirme dans son livre, la guerre d'Algérie n'a pas fait de lui une tête brûlée. Il est encore temps de faire marche arrière. (à suivre...)


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