Scène n Samedi 18 juillet 2009, 7 heures du matin, esplanade de la Grande Poste, au cœur d'Alger. Un homme d'une cinquantaine d'années, presque chauve et de petite taille, nettoie les lieux. Non sans difficultés, il faut bien le souligner. C'est que la place est jonchée de bouteilles et autres canettes. «Je n'ai pas le choix, je dois tout enlever», dit l'homme tout de vert vêtu. Et d'expliquer que le Festival panafricain (Panaf-2009) a sensiblement augmenté sa charge de travail : «J'ai vraiment souffert, je suis le seul à nettoyer l'endroit et avec toutes ces ordures, ce n'est pas du tout évident.» Ces ordures, ce sont les milliers de personnes qui ont assisté au spectacle organisé la veille qui les ont laissées. Curieusement, les poubelles qui y ont installées sont vides. «Tout le monde jette par terre, personne ne pense à nous», regrette le vieil homme. De son avis, la propreté est une question d'éducation. Ce qui est vrai. Malheureusement chez nous, on accorde de moins en moins d'importance à ce volet. A titre d'exemple, les parents prennent rarement la peine d'apprendre à leurs enfants que la propreté est primordiale. Pis encore, ils leur montrent le mauvais exemple en jetant les rebuts en pleine nature. Ainsi, les enfants grandissent avec l'idée que la saleté fait partie de notre culture. La scène à laquelle a assisté Ali, 52 ans, est à ce titre édifiante. Alors qu'il se trouvait dans une épicerie à Alger-centre, ce moniteur d'auto-école a vu un enfant âgé d'à peine cinq ans jeter par terre les épluchures d'une banane qu'il venait de manger. Ecœuré, il l'interpelle : «Pourquoi fais-tu cela mon fils ? Tu sais très bien que ce n'est pas bien.» Le bambin, pas plus haut que trois pommes pourtant, ne se fait pas prier pour répondre avec beaucoup de conviction : «Manach gouar aâmmou (nous ne sommes pas des Occidentaux)». Cette mentalité n'est pas propre aux enfants malheureusement. En effet, bien des adultes pensent, avec une certaine fatalité, que nous ne sommes pas faits pour être propres. Farida, 37 ans, cadre dans une boîte de communication, témoigne : «Une fois, j'étais assise dans un taxi à côté d'une femme d'un âge avancé. Comme il faisait très chaud ce jour-là, j'avais pris le soin de ramener avec moi une bouteille d'eau. Après avoir consommé le contenu, j'ai voulu m'en débarrasser et c'est là que j'ai demandé au chauffeur s'il avait une poubelle. Sans introduction aucune, la bonne femme intervient pour me suggérer de la jeter par la vitre. Ce que j'ai refusé de faire. Hors d'elle, la vieille dame me lance alors : ‘'Wach, hasba rouhek fi frança ?'' (tu te crois en France ou quoi ?)». Une réponse qui se passe de tout commentaire…