Résumé de la 13e partie n Neville Strange, même s'il n'a jamais disputé la finale de Wimbledon, reste un joueur de tennis de haut niveau... Il quitta le vestibule, redressa les épaules comme s'il s'était débarrassé de quelque fardeau et, après avoir traversé le salon, parvint à la véranda où, lovée au cœur d'un monceau de coussins, Kay, sa femme, buvait un jus d'orange. Kay Strange n'avait que vingt-trois ans et la vie l'avait dotée d'une beauté exceptionnelle : corps mince, qui irradiait cependant une sensualité subtile, chevelure d'un blond vénitien soutenu, peau si parfaite que le plus léger maquillage suffisait à en rehausser l'éclat, sans parler d'yeux noirs qui accompagnent rarement des cheveux roux et n'en produisent qu'un effet plus dévastateur. — Salut, ma splendeur ! lança gaiement Neville. Qu'est-ce qu'il y a pour le petit déjeuner, ce matin ? — Pour toi ? Des rognons d'aspect répugnant, répliqua Kay. Et puis des champignons et du bacon... — Ça me paraît parfait. Il se servit copieusement et se versa une tasse de café. Un silence fait de douce complicité régna quelques minutes. — Mmm ! murmura voluptueusement Kay en s'étirant, agitant un pied nu aux orteils peints d'écarlate. C'est merveilleux, ce soleil, non ? L'Angleterre n'est pas si moche, après tout. Le couple revenait tout juste du Midi de la France. Après un coup d'œil rapide aux manchettes des quotidiens, Neville était passé aux rubriques sportives et il se contenta d'un «hum !». Puis, optant pour des toasts et de la marmelade, il posa son journal de côté et commença de dépouiller son courrier. Ce dernier était abondant et il en déchira une bonne partie : des circulaires, des prospectus, des imprimés. — Je n'aime pas les tons que j'avais choisis pour le salon, murmura Kay. Je peux le faire repeindre, Neville ? — Tout ce que tu voudras, ma ravissante. — Du bleu paon, rêva-t-elle, et des coussins ivoire. — Pour aller avec le décor, il va te falloir un ouistiti ! — C'est toi qui joueras les ouistitis, dit Kay. Neville ouvrait une autre lettre. — Oh, à propos, dit encore Kay, Shirty a demandé qu'on l'accompagne sur son yacht pour une croisière en Norvège, fin juin. J'en suis malade, de ne pas pouvoir accepter. La jeune femme lança à son mari un prudent regard de biais. — J'aimerais tant être de la partie... Une sorte de nuage, comme une incertitude, voila un instant le sourire de Neville. Il faut vraiment que nous allions nous barber chez cette vieille Camilla ? se rebella Kay. Neville fronça les sourcils. — Evidemment, qu'il le faut. Voyons, Kay, je t'ai déjà expliqué la situation. Sir Matthew était mon tuteur. Camilla et lui m'ont pratiquement élevé. «La Pointe-aux-Mouettes», c'est un peu chez moi, pour autant que je puisse avoir un chez-moi. (à suivre...)