Ghorba, Légende, court métrage de la jeune réalisatrice, Amel Kateb, présenté, jeudi soir, au Centre culturel algérien à Paris, est un témoignage fort poignant sur la vie des «sans-papiers» en France. Dans la promiscuité d'une chambre d'hôtel de Barbès, la caméra dépeint le quotidien sordide de jeunes harragas algériens, fait de peur des contrôles d'identité et de petits boulots sans lendemain, comme la vente de cigarettes de contrebande aux abords de la station de métro ou des petits restaurants populaires de ce quartier du XVIIIe arrondissement de Paris. Ces jeunes «arrivés à Barbès grâce au GPS», comme le précise l'un des «personnages» du documentaire, ne s'adressent pas à la caméra. Ils parlent d'eux-mêmes, entre eux, tournent en dérision leur situation et portent un regard très critique et très noir sur cet Eldorado dont ils ont rêvé et pour lequel ils ont risqué leur vie en traversant la mer à bord d'un «botti» - une embarcation de fortune - qui a atteint par miracle un rivage, quelque part en Méditerranée. Une chanson du regretté Hasni écoutée sur un poste-cassette, l'évocation du nom de «Port aux poules», un bourg balnéaire sur la côte oranaise, la possession d'un maillot «rouge et blanc» du MCO, club phare d'El Hamri, réveillent en eux des souvenirs et attisent le sentiment de nostalgie et de frustration. Amel Kateb a expliqué que la réalisation de ce court métrage ne répond pas à «un effet de mode», mais à des «considérations personnelles». «Ces jeunes m'ont permis de mieux les comprendre et de porter un autre regard sur eux», a-t-elle indiqué. «Ces jeunes, durant toute la période du tournage, ont fait preuve d'un grand respect pour ma personne. Je n'ai perçu aucun geste ou parole déplacée. Ils sont loin d'être des délinquants, comme les présentent certains. Ils veulent vivre en paix, travailler et trouver une place dans ce pays d'accueil», a précisé la jeune réalisatrice. Ghorba, Légende se veut un témoignage sans fioritures sur la situation de tous ces jeunes «rejetés par la mer» sur une terre inhospitalière où l'on ne peut compter que sur soi.