Après avoir exercé les fonctions de cadi, Choudi y renonce brusquement. C'est, pensait-il, un métier où l'individu engageait sa responsabilité et sa conscience et qui valait, à ceux qui commettaient des erreurs, le courroux de Dieu. Ses parents et ses amis sont atterrés. Ils le supplient de revenir sur sa décision. «Les gens te font confiance, tu ne peux renoncer à une charge aussi importante !» Mais il refuse et répète inlassablement : «Je ne veux plus être cadi !» et, quand on l'interroge sur ce qu'il veut faire, il dit, le visage rayonnant d'une joie qu'il parvient à peine à dissimuler : «Je veux œuvrer dans la voie de Dieu !» Et la voie de Dieu, c'est la prière, le jeûne, la méditation… Il mange très peu et, enfermé dans sa chambre, il s'abîme dans le dh'ikr, l'invocation continue de Dieu et passe la nuit en prière… Mais cela ne lui suffit pas : il décide alors, pour se libérer de toute contingence, de partir. Il va quitter sa famille, ses amis, sa maison, ses livres qu'il aimait tant, son pays même. Un matin, il s'en va comme un voleur et embarque pour le Maghreb. Le Maghreb, terre d'Islam, mais pays inconnu pour lui, qui va lui permettre de se réaliser et de devenir un grand saint, aujourd'hui encore vénéré par le peuple…