Résumé de la 2e partie n Les soldats des deux camps font la trêve pour rechercher la petite statue de saint Ignace qui a disparu de l'oratoire... Les nandous gobent tout ce qui brille. La statue d'ivoire devait briller un peu dans l'ombre et il l'aura avalée ! C'est certain ! — Ce nandou n'était qu'un envoyé du Diable. C'est Lucifer qui l'a dépêché pour qu'il s'empare du petit saint qui nous porte chance ! Déjà les plus rapides des Espagnols se sont élancés sur la piste du gros oiseau mais celui-ci, par pur instinct, s'élance aussi dans les grandes herbes et les distance sans le moindre mal. Don Ramon et Don Gutierez, le chef de l'autre parti, se mettent d'accord pour s'organiser : — Les nandous ont leur territoire et ils ne s'éloignent jamais beaucoup de celui-ci. Un prêtre qui sait lire précise : — Chez ces animaux ce sont les mâles qui couvent les œufs. Or, nous sommes en pleine période de couvaison. Le nandou va revenir s'installer sur les œufs pondus par la femelle, cela est certain. Il ne s'en est éloigné qu'à cause de la chaleur de midi qui lui permettait de prendre un peu d'exercice ! Du coup on se divise en deux groupes : l'un part vers l'est, l'autre vers l'ouest. Les soldats se sont munis de filets et il ne s'agit plus que de prendre en tenaille les familles nandous. Récupérer la statue de saint Ignace est bien plus important que de tuer quelques Indiens guaranis ou de violer quelques Indiennes impubères. En définitive, il faudra plusieurs heures au groupe pour arriver à ses fins. On encercle quelques nandous et, faute de pouvoir identifier le coupable du vol, on tue tous les mâles. Et l'on se met ensuite en devoir d'ouvrir toutes les dépouilles. Les mouches bourdonnent bientôt autour des entrailles sanglantes dans lesquelles les Espagnols, désespérés, plongent leurs mains pour retrouver leur «petit saint». En vain. Ce qu'ignorent les Espagnols c'est que le nandou possède un estomac aux possibilités incroyables. Pour lui permettre de digérer toutes les nourritures qu'il peut avaler, le nandou est doté d'un organe digestif qui agit comme une broyeuse. Rien n'y résiste : ni fruit, ni caillou, ni... petit saint d'ivoire. Les Espagnols cessent enfin de farfouiller parmi tous les estomacs ouverts et s'étonnent de ne pas y trouver la statue. — Le nandou voleur nous aurait-il échappé par l'intervention de Lucifer ? — Certes point ! Nous l'avons vu se mêler au groupe de ses congénères et s'installer sur les œufs. Comme nous avons tué tous les mâles, il est forcément dans le lot. Si la statue de saint Ignace a disparu de son estomac, c'est un miracle. Un vrai miracle avéré ! Pour ces hommes sincères et féroces mais naïfs, tout ce qu'ils ne peuvent expliquer tient du miracle. Et que faire quand un miracle a lieu sur l'empire de Charles Quint, entre les mains de son petit-fils Philippe III d'Espagne, empire sur lequel, de l'Orient à l'Occident, «le soleil ne se couche jamais» ? Il faut en informer Sa Majesté. Nul doute que cette nouvelle vaille à ceux qui en ont été les témoins et pratiquement les acteurs, quelques pensions, quelques titres de noblesse ou quelques récompenses. (à suivre...)