Résumé de la 3e partie n Ne pouvant désigner le nandou voleur, on en tue quelques-uns. En vain. On décide d'informer le roi de la disparition de saint Ignace... Don Ramon, malgré l'opposition de Don Gutierez, décide qu'il lui revient d'informer leur maître tout-puissant. On cherche en hâte un parchemin, de l'encre, de la cire et une chandelle, puis promptement la lettre très respectueuse est rédigée : «A Sa Majesté Philippe III en son palais royal de Madrid...» Le parchemin est séché à la poudre, scellé à la cire. La bague de Don Ramon sert de sceau et un messager est envoyé sur un des meilleurs chevaux pour remettre la missive importantissime au gouverneur qui, n'en doutons pas, la fera suivre jusqu'au maître de l'Empire. Les nandous épargnés par les conquistadores se remettent à vivre leur vie d'oiseaux coureurs. Il faut plusieurs semaines pour que le message parvienne enfin à Madrid. Ouvert par le secrétariat particulier de Sa Majesté très catholique, il est enfin présenté à celui qu'on consi-dère comme le maître du monde civilisé. Or, Philippe III fronce les sourcils car Don Ramon s'est cru obligé, pour expliquer le «miracle de la statue de saint Ignace», de relater en détail les circonstances dans lesquelles le nandou s'est emparé de la statue. Il a donc commencé par le combat entre les deux clans rivaux de conquistadores. Il n'a pu s'empêcher d'expliquer qu'il avait prévu de faire payer un tribut à chacun de ceux qui préten-draient vouloir faire leurs dévotions. Et puis, il a dû raconter la trêve dans la chaleur, et l'intrusion du nandou, et la course de plusieurs heures pour rattraper l'animal voleur. Philippe III n'aime pas du tout ça : — Que croit donc ce Don Ramon ? Il pense que je dépense mon bon or pour envoyer au-delà des mers des fainéants batailleurs et imbéciles ? Ils sont là-bas pour y découvrir des trésors, pour y installer des conquérants chrétiens et pour contribuer à l'enrichissement de la très sainte Espagne. Au lieu de cela, ils se mettent en tête de faire payer des tributs, ce qui est le privilège de mes collecteurs. Ils s'entre-tuent comme de vulgaires coupe-jarrets et perdent leur temps à courir derrière des oiseaux immangeables. Il faut mettre bon ordre à tout cela. Au lieu de perdre leur temps en bêtises superstitieuses, ils feraient mieux de réduire à la raison ces Indiens Guaranis qui nous causent tant de problèmes et provoquent tant de pertes humaines dans nos rangs ! Ces hommes indignes du nom d'hidalgos mériteraient la corde ! Parmi les courtisans rassemblés autour du monarque un prêtre silencieux fronce les sourcils. Le révérend père Fernando est le plus attentif. Entre lui et le roi tout-puissant pas besoin de longs dialogues. Le révérend père Fernando est de la race de saint Ignace : un jésuite élevé dans le sérail, et de surcroît fort intelligent. Si ce n'était pas le cas, les «hommes en noir» ne l'auraient pas désigné pour faire partie de l'entourage de Sa Majesté très catholique. Un regard de Philippe III lui suffit pour qu'il comprenne que le monarque désire l'entretenir en particulier dans un cabinet dont il connaît l'accès. Quelques heures plus tard l'entrevue a lieu. Ce qui se dit ne filtrera pas au-delà des murs tendus de cuir de Cordoue. Mais très peu de temps après, Don Ramon et les conquérants espagnols de la province du Paraguay ont une surprise : au lieu des prébendes, récompenses et autres titres de noblesse qu'ils attendaient, ils voient arriver par pleins galions une nuée d'hommes noirs, de ces Jésuites que beaucoup haïssent. (à suivre...)