Bizarrerie n Mais alors que les garçons de son âge jouent au ballon ou à la guerre, lui s'enferme dans une chambre, pour habiller ses poupées ! L'homme foudroie les policiers du regard. — je n'ai rien fait ! Il a entraîné un jeune garçon au commissariat de police, alléguant qu'il l'a insulté. Mais le prétendu agresseur se révèle vite être une victime. — Il voulait abuser de moi, il a cherché à me tuer ! — ce n'est pas vrai ! hurle l'homme. — demandez aux voisins, dit le jeune homme. Certes, le garçon n'est qu'un vagabond mais la police va prendre au sérieux l'accusation. Une enquête est aussitôt lancée et l'on va découvrir que l'homme est un meurtrier, l'un des plus impitoyables et des plus cruels de cette première moitié du XXe siècle… Quand la police a procédé à son arrestation, en 1919, Fritz Haarmann, que l'on va surnommer le boucher de Hanovre, est âgé de quarante ans. Né en 1879 à Hanovre, métropole industrielle de la Basse Saxe, il appartient à une famille d'ouvriers pauvres qui peine à nourrir sa nombreuse famille. S'il déteste son père, qui n'hésite pas à le corriger à chaque fois que l'occasion se présente, il aime tendrement sa mère, une femme que la maladie cloue au lit. Le jeune garçon n'est pas un modèle de beauté avec ses oreilles décollées et son menton trop large. Il n'est pas non plus un modèle d'intelligence et, à l'école, il a toutes les peines du monde à apprendre à lire et à écrire. Devenu adulte, il gardera une intelligence très limitée et, pour ceux qui le côtoient, il paraît même «débile» . Mais Fritz est encore enfant et comme tous les enfants, il aime jouer. Mais alors que les garçons de son âge jouent au ballon ou à la guerre, lui s'enferme dans une chambre pour habiller ses poupées ! L'un des hommes le plus sanguinaires qu'aura connus le monde moderne a une âme de petite fille modèle ! si sa mère le soutient, son père, ses frères et ses petits camarades se moquent de lui. «tu n'es qu'une fille !», lui lancent-ils, pleins de mépris. Son père le bat. — si tu continues à te comporter comme une fille, je te tords le cou ! Mais lui, indifférent à tout, continue à jouer avec ses poupées. Devenu adolescent, il développera un goût très fort pour les activités féminines comme la pâtisserie, la cuisine et surtout la couture. Il adore se travestir, porter les robes de sa mère, mettre des souliers à talons et se maquiller comme une femme. Il passe des heures devant la glace à mimer des scènes, à parler et à inventer des histoires. Son père le retire de l'école, où il n'apprend rien, et le met en apprentissage chez un serrurier, mais comme il n'y apprend rien non plus il l'envoie dans une école militaire. A l'époque, les écoles militaires et les casernes allemandes recrutaient beaucoup, en prévision d'une guerre qui s'annonçait. Il ne voulait pas, bien sûr, aller dans cette école où la première des valeurs enseignées est la virilité : il n'aime pas les exercices auxquels on l'astreint et rêve de retourner à ses poupées et à ses robes. A suivre K. Noubi