Un hommage a été rendue jeudi soir, à la maison de la culture de Béjaïa, à deux figures de proue de la chanson kabyle, Kaci Abdjaoui et Arezki Bouzid et ce, en présence d'un nombreux public venu redécouvrir, leurs airs qui, malgré les années, n'ont pas pris une seule ride. M'laayoun Taous, chanté quasiment dans toutes les chaumières et modulé telle une aubade depuis quasiment un demi-siècle est de ceux-là. Les spectateurs, entraînés par la voix chaude de H'sinou, l'ont répété a capella des minutes durant sans la moindre aide. Le plus étonnant, c'est que la reprise a été l'apanage de la nouvelle génération qui a donné la preuve de son intérêt et son attachement à ce qui est supposé être l'ancien répertoire de la chanson kabyle. Arezki Bouzid, qui était dans la salle, en avait les larmes aux yeux mais aussi le sourire. «C'est inouï», répétait-il simplement ravi. «Je renais. C'est le plus beau jour de ma vie. Merci à tous», a-t-il susurré au micro, totalement sous l'emprise de l'émotion, promettant en guise de gratitude, de revenir sur scène avec de nouvelles chansons. A 74 ans, l'artiste a encore bon pied, bon œil et l'allure d'un dandy. Portant un costume clair sur une chemise et cravate noires, et auréolé d'un chapeau à la couleur de son complet, Da Arezki n'a rien perdu de sa verve ou de sa tonicité. Invité à s'exprimer sur l'hommage qui lui est rendu, il en a profité, pour en faire la démonstration, exécutant admirablement un autre grand titre de son répertoire Aouina yu ghalène dha tir (Si je pouvais être oiseau), une complainte sur l'émigration. L'initiative a suscité le même engouement et le même entrain que M'layoun Taous, mais a prouvé, surtout, que le personnage est en mesure de chauffer bien des salles. Arezki Bouzid cumule une carrière de 51 ans de générosité et de don de soi. Il a côtoyé les grands, notamment Slimane Azem, Cheikh Nordine, Idhebalen, et en a tiré la quintessence. Son répertoire, composé d'une centaine de chansons, est une boîte à succès, dédié à l'amour, au mal être, à l'exil ou au pays qui souffrait des affres du colonialisme. Cet hommage a également fait la part belle à l'autre artiste, Kaci Abdjaoui, absent pour cause de maladie, mais dont le dénominateur commun avec Arezki Bouzid reste cette générosité pour l'art de la chanson, que tous les deux ont porté au firmament. Kaci Abdjaoui, de son vrai nom Dehouche Belkacem, âgé de 65 ans, a produit également un bouquet de chansons à succès hors pair dont le parfum reste toujours aussi vivace et prenant qu'à leur sortie. R. C. / APS