Résumé de la 4e partie n C'est Marquis qui sauvera Pope de la mort, Mister Groven s'étant introduit dans la chambre pour tuer et voler son maître... Des étages supérieurs les valets en tenues plus que légères dévalent les escaliers pieds nus. Dès qu'ils pénètrent dans la chambre, ils sont bousculés par Marquis et Mister Groven qui forment une masse tournoyante. Quelqu'un arrive avec une lumière et l'on comprend tout. Il ne reste plus qu'à immobiliser Mister Groven. D'emblée tout le monde est persuadé que Marquis, le bon caniche, ne pouvait être que du côté du droit... Quand on se précipite dans la ruelle pour demander aux trois hommes inconnus ce qu'ils font là, ils ont déjà disparu sans demander leur reste. Le remue-ménage, les cris, les aboiements venant de la chambre du maître de maison leur ont vite fait comprendre qu'il n'y avait plus rien à attendre de bon de leur expédition. Mister Groven, remis aux mains du shérif de Twickenham, ne peut qu'avouer son inten- tion : il devait s'emparer de la montre de la reine Caroline et de quelques autres babioles et bijoux d'or et d'argent avant de décamper et se faire oublier. Son compte est fait et la justice royale le condamne à être pendu haut et court en bon gibier de potence qu'il est. Pope et Marquis assistent à l'exécution du malandrin. Les trois complices, qu'on n'a jamais pu identifier, sont peut-être perdus au milieu de la foule qui assiste à l'exécution comme on assisterait à un spectacle gratuit et dont on apprécie à l'avance tout le cérémonial mortel. La question que la foule se pose est : «Mister Groven va-t-il avoir le cœur à l'ouvrage pour sauter le pas ?» Alexander Pope espère, en assistant à ce spectacle, y trouver une idée nouvelle pour l'ouvrage qu'il compose. Après la «cérémonie», il note sur son journal : «Je n'ai jamais connu un seul homme qui ne puisse supporter les malheurs des autres en parfait chrétien.» A partir de ce jour, Marquis devient le roi de la maison. Il a désormais le droit de dormir dans la chambre et même sur le lit de son maître adoré. Après tout, qui dit qu'il n'y aura pas une autre tentative criminelle contre un poète qui est, de notoriété publique, plus qu'à l'aise. Un poète qui construit dans le parc de sa propriété une «grotte merveilleuse» dont le tout-Londres décrit à l'envi les détails architecturaux. Pope, auteur d'un fameux Essai sur l'homme, passera pourtant de longues heures à essayer de percer un mystère animal sans réponse : «Comment Marquis a-t-il pu plusieurs années à l'avance sentir d'instinct que Mister Groven, le seul domestique avec lequel il se montrait agressif, deviendrait un jour un assassin en puissance ?» Mais la vie de Marquis arrive à sa fin et Pope lui survivra, ce qui est bien naturel. Marquis aura avant de mourir, si l'on peut dire, l'honneur d'être présenté comme un phénomène de fidélité et d'intelligence à tout un aréopage de nobles dames. Pope était-il accompagné de Marquis le jour où rencontrant Jonathan Swift, l'immortel auteur des Voyages de Gulliver, il lui demanda abrup-tement et sournoisement : — Que dit-on de moi dans le royaume ? Swift, le regardant de haut en bas, lui répondit le plus aimablement possible : — On dit que vous êtes un homme fort petit par la taille mais fort grand poète. Pope lui sourit de ses dents jaunes et répliqua: — C'est exactement le contraire de ce que l'on dit de vous ! Pierre Bellemare