Résumé de la 2e partie n On capture la femme nue et on la ramène au village. On la confie au curé... Donc, cette femme nue, qui parle français, doit appartenir à une couche sociale relativement bourgeoise. Elle parle de mari. Celui-ci serait-il resté là-haut, nu comme un ver, au milieu des ours ? La femme nue refuse pourtant la nourriture que lui offre la bonne du curé. Celui-ci décide qu'une nuit de repos solitaire calmera sans doute les frayeurs de la pauvre créature. — Marie, préparez la chambre du haut et disposez quelque nourriture pour cette pauvre femme. Les bonnes âmes du village offrent quelques vêtements décents pour la femme qui ne peut rester nue et celle-ci se retrouve enfermée à clef dans une chambre dotée d'un bon lit. Par précaution, on n'a pas allumé de feu dans la cheminée mais la couette de plume, le repas frugal et la cruche d'eau fraîche devraient lui permettre de retrouver son calme. — La femme nue n'est plus là ! C'est ainsi que monsieur le curé constate, le lendemain matin, l'échec de ses tentatives pour ramener sa nouvelle ouaille à la civilisation : la femme nue est parvenue, on ne sait comment, à ouvrir le volet pourtant hermétiquement fermé de la chambre où elle était confinée. L'agilité qu'elle a acquise dans la montagne lui a permis de gagner le toit du presbytère et, d'un bond démesuré, elle a sauté sur le chemin. Les vêtements dont on prétendait l'affubler la veille jalonnent le parcours qui l'a conduite vers la montagne et ses amis les ours. Ils sont en charpie… Quelques jours plus tard, des bergers redescendant de la montagne et donnent des nouvelles de la femme sauvage : — La «bioundina» est repartie là-haut. On l'a vue. Elle est toute nue, comme d'habitude, et il y a toujours un ou deux ours à ses côtés ! Du coup les messieurs de la ville apprennent que la «bioundina», autrement dit la «blonde», n'est pas vraiment inconnue au village. Depuis deux ou trois au plus, les bergers qui mènent les moutons à l'alpage ont eu l'occasion de la rencontrer. Une femme nue, encore jeune, d'une propreté douteuse, est une rencontre assez insolite et agréable pour les hommes du pays. D'ailleurs, eux non plus ne sentaient sûrement pas la rose mais à leur grande déconvenue la femme nue ne se laissa pas approcher. Pour l'apprivoiser, on lui donne du lait. Elle attend qu'on soit un peu loin pour venir et le boire. On lui donne aussi du pain et du fromage. Souvent, elle nage dans les lacs, pourtant glacés et pleins de sangsues. Parfois on la voit assise sur un rebord rocheux inaccessible. Elle a l'air plongée dans ses pensées, parfois elle a l'air de pleurer, le visage enfoui entre ses mains. Elle nous dit des choses mais ce doit être du français, alors on n'y comprend rien. — Ce qui est bizarre c'est que les ours ont l'air de la protéger. Comme si c'était sa famille ! — Dame, vous avez vu, elle est plutôt simplette. Il paraît que les animaux respectent instinctivement ceux qui sont un peu fadas… — Il faudrait la rattraper avant l'hiver. Comment peut-elle survivre avec la neige et le froid, nue comme elle est ? Depuis que la femme nue a séjourné au village l'espace d'une nuit, on échafaude des suppositions : — Il paraît que c'est une Française de Paris, une dame noble. Il y a quelques années, pour fuir la Révolution, elle est partie en Espagne avec son mari. Et puis ils ont voulu revenir mais comme ils ne possédaient pas de passeport, ils ont décidé de franchir les Pyrénées à pied, sans guide. (à suivre...)