Interdiction n En plus de l'alcool introduit frauduleusement de l'étranger, brasseries et distilleries clandestines n'arrêtent pas de produire de l'alcool. Dans les années 1920, les Etats-Unis vivent sous la prohibition, prohibition en anglais. Ce mot a la même signification qu'en français : interdiction, mais dans ce pays, le mot prend un sens particulier : interdiction de la vente et de la consommation d'alcool. C'est le 18e amendement de la constitution américaine, ratifié en janvier 1919, qui a interdit la fabrication, la vente et l'achat, sur tout le territoire de l'Union, des boissons qui contiennent plus de 0,5% d'alcool. En fait, la prohibition a commencé au XIXe siècle quand, sous l'influence des associations religieuses, l'Etat du Massachusetts a décidé que la vente de rhum ne se ferait qu'en grosse quantité et à prix élevé pour éviter que les gens du peuple ne s'enivrent. Les milieux conservateurs applaudissent la décision et un parti rassemblant les adversaires de l'alcool est créé en 1869 : c'est le Prohibition Party. Parti en guerre contre l'alcool, il parvient, lors des élections présidentielles de 1888 et 1892 à rafler 2,2% des suffrages, ce qui était un véritable exploit pour un petit parti. Depuis le début du siècle, ce parti n'a de poids qu'au niveau local mais les prohibitionnistes vont devenir plus nombreux et un combat sans merci est livré contre les maux sociaux, notamment l'ivrognerie, à la source d'un grands nombre de délits. Les prohibitionnistes ne sont plus des bigots, comme c'était le cas au Massachusetts mais des progressistes qui combattent également la pauvreté et l'injustice sociale. Ils sont rejoints par de nombreux Américains qui souhaitent un retour à une société saine. Plusieurs Etats sont conquis par ces idées et interdisent l'alcool avant 1914. d'autres, au nom de la liberté individuelle, hésitent. L'entrée dans la première guerre mondiale de l'Amérique favorise le nationalisme : les prohibitionnistes profitent du climat général pour obtenir un amendement à la constitution : désormais l'alcool est interdit sur tout le territoire américain. En même temps que les idées prohibitionnistes se développent un courant anti-immigrants : on juge en effet que l'alcoolisme est une tare européenne et qu'elle est transportée par les immigrants. Naguère progressistes, les prohibitionnistes se rapprochent des groupes fondamentalistes, voire racistes, comme le Ku Klux Klan. La non-prohibition a bien sûr ses militants : amateurs de boissons alcoolisées mais aussi défenseurs des libertés individuelles que le 18e Amendement remet en cause, selon eux. Des campagnes ont été menées pour sa suppression mais le poids des prohibitionnistes est trop grand pour que ces revendications aboutissent. En attendant, la prohibition fait le bonheur des trafiquants : en plus de l'alcool introduit frauduleusement de l'étranger, brasseries et distilleries clandestines n'arrêtent pas de produire de l'alcool, vendu au prix le plus fort. Gangsters et bootleggers ou trafiquants d'alcool se disputent à mort ce marché très juteux. Et parmi ces trafiquants qui sont aussi des criminels, le plus connu est Al Capone, fils d'immigrés italiens, installés depuis peu en Amérique. A force de crimes et de trafic, il s'est taillé une place de choix dans le banditisme américain. Les autorités sont au courant de ses activités, mais faute de témoins pour le dénoncer, il vit dans l'impunité… (à suivre...)