Résumé de la 53e partie n Dakin table sur l'improvisation pour réussir le coup... Ici, à l'hôtel, poursuivit Dakin, nous ne sommes que deux à être au courant : vous et moi. — Mais ils apprendront que Crofton Lee a quitté l'ambassade pour venir ici. — Ils l'apprendront, c'est inévitable. Mais ce que vous ne paraissez pas voir, Crosbie, c'est que, quoi qu'ils tentent contre ce que nous aurons improvisé, ils devront, eux aussi, l'improviser. Le Tio est, dans l'affaire, un élément nouveau. Personne n'a pu venir s'y installer il y a six mois pour y manigancer quelque chose. Jamais il n'a été question de fixer au Tio le rendez-vous. Dakin consulta sa montre et ajouta : — Je vais voir Crofton Lee. La porte de sir Rupert s'ouvrit avant qu'il n'eût frappé. La pièce n'était éclairée que par une lampe minuscule, placée près du fauteuil que Crofton Lee avait quitté pour aller accueillir son visiteur. Avant de se rasseoir, Crofton Lee posa sur la table le petit pistolet automatique qu'il tenait à la main. — Alors, Dakin ? demanda-t-il. Vous pensez qu'il viendra ? — Je le crois, sir Rupert. Vous ne l'avez jamais rencontré ? Crofton Lee secoua la tête. — Non. Je serai content de faire sa connaissance. Ce jeune homme, Dakin, doit avoir un certain cran. — Il en a, déclara Dakin. Et beaucoup ! Il était surpris, et surtout peiné, que sir Rupert eût cru devoir rendre hommage au «cran» de Carmichaël. — Je ne parle pas de son courage, reprit Crofton Lee. Il a fait une guerre magnifique. Je fais allusion à autre chose, à… Il cherchait un mot. — A son imagination ? suggéra Dakin. — Si vous voulez ! Il a eu le cran de croire quelque chose qui était tout à fait improbable, le cran de risquer sa vie pour prouver qu'une fable ridicule n'était pas du tout une fable… ça demande une qualité d'homme qui ne se rencontre pas souvent chez les jeunes gens d'aujourd'hui. J'espère qu'il viendra. — Je crois qu'il viendra. — Toutes vos dispositions sont prises ? — Toutes. Crosbie sur le balcon, moi dans le couloir, surveillant l'escalier. Quand Carmichaël arrivera chez vous, frappez à la cloison, je viendrai. — Bien. Sans bruit, Dakin quitta la pièce pour gagner, tout à côté, sa propre chambre, d'où, par la porte légèrement entrouverte il apercevait le haut de l'escalier. Sa veille commençait. C'est seulement quatre heures plus tard, qu'une gufa, une des embarcations primitives qui circulent sur le Tigre, vint silencieusement s'immobiliser sur la rive boueuse du fleuve, non loin du Tio Hotel. Quelques instants plus tard, une mince silhouette entreprenait l'ascension de la corde à nœuds accrochée à la balustrade de la terrasse. Sur la façade du Tio, une autre corde attachée à un balcon, pendait vers le sol dans l'ombre épaisse des eucalyptus et des arbres de Judée. (à suivre...)