Si le XVIIIe siècle a vu se développer en Europe le mythe du vampire, il ne faut pas non plus oublier que c'est le siècle des Lumières et de la Raison triomphante sur l'obscurantisme et la superstition. C'est le siècle de Gœthe, de Voltaire, de Rousseau et de l'Encyclopédie, qui vont magnifier la science et l'opposer aux relents de superstitions, perpétués notamment par les milieux religieux. Dans l'article qu'il consacre aux vampires dans son Dictionnaire philosophique, Voltaire s'indigne : «Quoi ! C'est dans notre XVIIIe siècle qu'il y a eu des vampires ! C'est après le règne des Locke, des Shaftesbury, des Trenchard, des Collins, c'est sous le règne des d'Alembert, des Diderot… qu'on a cru aux vampires !» Et le célèbre philosophe d'ajouter, plein d'ironie : «Ces vampires étaient des morts qui sortaient la nuit de leurs cimetières pour venir sucer le sang des vivants, soit à la gorge ou au ventre, après quoi, ils allaient se remettre dans leurs fosses. Les vivants sucés maigrissaient, pâlissaient, tombaient en consomption ; et les morts suceurs engraissaient, prenaient des couleurs vermeilles, étaient tout à fait appétissants. C'était en Pologne, en Hongrie, en Silésie, en Moravie, en Autriche, en Lorraine, que les morts faisaient cette bonne chère. On n'entendait point parler de vampires à Londres, ni même à Paris. J'avoue que dans ces deux villes, il y eut des agioteurs, des traiteurs, des gens d'affaires, qui sucèrent en plein jour le sang du peuple, mais ils n'étaient point morts quoique corrompus.»