Résumé de la 88e partie n pour s'évader, Victoria pense à s'emparer de la clé. Mais comment va-t-elle s'y prendre ? Le soir commençait à tomber. Victoria alla coller son œil au trou de la serrure. Elle ne vit rien. C'était bon signe. La clé était là. Restait à la chasser. Il fallait un corps dur, un crayon ou un stylo suffirait, mais on lui avait pris son sac à main. Elle ne disposait que d'une cuillère, objet beaucoup trop grand. Heureusement, elle jeta les yeux sur ses souliers. Elle en enleva un, retira la semelle intérieure et la roula en une tige très fine, qu'elle introduisit dans le trou de la serrure. Elle dut fourgonner à l'intérieur pendant deux où trois minutes, mais elle finit par obtenir un résultat : la clé tomba sur le sol avec un bruit presque imperceptible. — Maintenant, dit Victoria, parlant tout haut sans s'en douter, il faut faire vite ! Dans un quart d'heure, on n'y verra plus... Elle alla chercher la cruche et versa de l'eau par terre, tout près de la porte. Après quoi, avec la cuillère, elle creusa dans la boue fraîche. L'opération prit du temps et la cruche ne contenait presque plus d'eau quand Victoria, les manches de son corsage retroussées au-dessus du coude, put glisser son bras sous la porte. Elle avait repéré la clé, mais celle-ci restait hors de sa portée.Victoria songea alors à l'épingle à nourrice qui assurait provisoirement la liaison entre sa chemise et une de ses épaulettes. Bientôt, elle disposait d'un crochet qu'elle fixa dans une tranche de pain arabe. Quelques instants plus tard, la clé était entre ses mains. A genoux, les mains pleines de boue, Victoria s'accorda trente secondes pour se dire qu'elle était vraiment «une fille épatante», puis se leva et introduisit la clé dans la serrure. Elle attendit quelques instants. On n'entendait que le chœur des chiens du voisinage. Elle savait qu'ils aboieraient jusqu'au jour. Elle tourna la clé, poussa la porte et jeta par l'entrebâillement un coup d'œil prudent. Elle vit une petite pièce, au fond de laquelle il y avait une porte ouverte. Elle avança sur la pointe des pieds. Au- delà de la porte, un escalier conduisait au jardin. Victoria en savait assez. Elle regagna sa «prison», où, selon toute probabilité, nul ne viendrait plus la déranger ce soir-là. Elle attendrait la nuit et, quand alentour tout dormirait, elle s'en irait. La chance était avec elle : près de la porte, elle avait remarqué un tas de chiffons qui ne pouvait être qu'une vieille aba, un costume arabe qui lui serait bien utile pour cacher ses vêtements européens. Elle patienta longtemps. Le moment vint enfin où le silence quasi total s'établit, troublé seulement par les hurlements des chiens et le nasillement d'un vieux phono qui, très loin, ressassait des mélopées arabes. Victoria crut reconnaître aussi le cri du chacal. — Tant pis ! dit-elle. On y va ! Elle sortit, fermant la porte et laissant la clé dans la serrure, traversa avec précaution la pièce voisine, ramassa au passage la vieille aba, et se trouva en haut de l'escalier. La lune était encore assez bas dans le ciel, mais elle éclairait suffisamment. (à suivre...)