Exposition n L'univers pictural proposé par Jaoudet Gassouma et dans lequel il se différencie de ses pairs, est très original. Cette originalité transparaît dans la transgression des schémas de création classique, voire simplement académique. Une liberté qu'il assume parfaitement et avec beaucoup d'imagination. C'est cette imagination unique et spécifique à l'artiste qui surprend et suscite l'intérêt pour ses peintures accrochées aux cimaises de la galerie d'art Mohamed-Racim depuis jeudi et jusqu'au 15 mai. C'est un univers chargé, coloré et vivant. L'artiste se plaît à représenter des personnages hors normes, exceptionnels, voire à la physionomie étrange. Ce sont des êtres insolites, sortis d'une imagination débordante, particulièrement démesurée. Il s'emploie malicieusement à les déformer, les déboîter, les désarticuler, transfigurant par là leur morphologie originelle. Leur anatomie humaine est convertie en une apparence excentrique, extraordinaire et, parfois, incompréhensible tant la tournure dans laquelle ils apparaissent est hétéroclite, déroutante… Ainsi, ces personnages apparaissent dégingandés, avec un style particulier, irréaliste, un peu pop -art, un peu urbain. Du rouge, du vert, du jaune, du violet : c'est un vrai festival de couleurs qu'offrent les toiles. La représentation s'avère aussi spectaculaire : l'artiste ne se limite pas à peindre, mais il s'amuse, loin de tout geste machinal ou calculé, à mettre en scène son personnage et à le camper dans une scénographie inhabituelle, voire extravagante. Les peintures de Jaoudet Gassouma comportent une part de théâtralité. Le jeu est tout à fait naturel, drôlement délirant. La représentation se révèle également caricaturale. Car il s'agit d'une représentation de portraits exagérée, comme si elle avait été faite avec une intention comique, presque satirique. Il y a une imitation cocasse de l'individu. Les êtres que conçoit l'artiste, prennent des allures vraiment hilarantes. Bahlool Lemdina, Yemchi Fel Lil… autant de titres évocateurs et qui renvoient visiblement à la démarche de l'artiste. Une démarche qui consiste à traduire ce qu'il ressent ou vit d'une manière naturelle et avec ses perceptions ou ses codes d'interprétation. Ce qui nous amène systématiquement à dire que l'artiste a une allure de primitif, puisqu'il ne respecte pas les conventions du réalisme optique ou bien le tempérament du moi intérieur. Ces besoins du moment – ceux qui concernent son inspiration subite et improvisée – le conduisent, à l'heure actuelle, et certainement, à enfreindre les modèles de création déjà existants. Il crée ses propres modes d'expression picturale. Il compose son propre monde fait d'images, de référents et surtout de couleurs ; celles-ci confèrent au contenu une matérialité épaisse, palpable, ronflante. L'artiste affirme que sa peinture est le fruit de plusieurs influences, un peu à la Picasso, un peu à la N'débélé. Ce sont des tendances visuelles, africaines et méditerranéennes, allant des dessins corporels des Massaïs, aux décorations murales de l'Egypte anciennes, en passant par les couleurs et style kabyles. L'exposition a pour titre «Ouahed ou A3chrin» (21), et c'est avec cette performance que l'artiste a choisi de fêter ses 21 ans de carrière. Yacine Idjer