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Patrimoine
Si «Hizia» m'était contée
Publié dans Info Soir le 30 - 05 - 2011

Rencontre n Hizia, histoire d'une passion amoureuse intimement liée au patrimoine de Bazer-Sakra.
Le nom de Hizia, une jeune femme de la tribu nomade des Douaouda, qui transhumait régulièrement à Bazer-Sakra (El-Eulma, dans la wilaya de Sétif) est définitivement lié à une passion amoureuse à la fois romantique et authentique, immortalisée par le poète Benguitoun qui en a fait l'un des plus grands chefs-d'œuvre de la poésie populaire algérienne.
Cette histoire d'amour, à laquelle la commune de Bazer-Sakra consacrera dès demain, mardi, le 2e Festival national Hizia des patrimoines et arts populaires, peut être classée dans le même registre que les passions mythiques, éternisées dans les littératures des peuples, à l'instar de Kaïs et Leïla ou Antar et Abla pour la littérature arabe classique, ou encore Roméo et Juliette, Tristan et Iseult et Paul et Virginie pour la littérature universelle.
Une histoire aux liens si forts avec la région de Bazer-Sakra.
Une stèle, très visitée, notamment par la gent féminine, a été d'ailleurs érigée dans cette localité à la mémoire de ces amoureux de légende.
C'est pourquoi les organisateurs du festival ne ménagent aucun effort pour faire de cette manifestation le 2e plus grand événement culturel de la wilaya de Sétif après le Festival international de Djemila, en veillant à ce que les activités au programme soient en rapport avec le patrimoine qui s'est tissé autour de Hizia. Le programme du 2e Festival Hizia des patrimoines et arts populaires, comporte une grande opérette intitulée Matar Edhakira (Pluie de la mémoire).
Des troupes folkloriques représentant diverses régions du pays, des courses de chevaux et des fantasias, sont également au programme de cette manifestation qui aspire à devenir un rendez-vous incontournable pour les arts et patrimoines populaires. Une kheïma des poètes, des shows de troupes folkloriques et des expositions mettant en exergue les traditions et l'artisanat local, ainsi que des conférences sur le patrimoine et la littérature populaires, sont également au menu de la manifestation. La 1re édition du Festival Hizia, organisée à El-Eulma en 1995, avait connu un franc succès. Le nom de Hizia a été immortalisé en un poème élégiaque par Benguitoun. La qacida a été chantée par un grand nombre de grands artistes algériens, dont El-Bar Amor, Abdelhamid Ababsa, Rabah Driassa, Khelifi Ahmed et bien d'autres encore. Benguitoun mentionne, en effet, dans son poème, le nom de Bazer comme lieu de l'idylle entre Hizia et Seyid, son amoureux. C'est en rentrant d'un séjour à Bazer, par où transhumait sa tribu nomade, que Hizia fut ravie à la vie d'une manière mystérieuse. Elle n'avait que 23 ans. L'on rapporte que Hizia Bouakkaz, fille d'Ahmed Ben El-Bey, de la tribu de Douaouda, et son cousin, Seyid, élevé par son père dans la même famille et sous le même toit, se sont épris l'un de l'autre dès leur jeune âge, pour voir leur amour grandir. A l'âge adulte, l'amour qui liait ces deux cousins issus d'une tribu de Sidi Khaled, dans la wilaya de Biskra, commençait à se heurter aux lois implacables de la tradition qui interdisait toute liaison en dehors du mariage.
Les deux tourtereaux étaient forcés de se voir en cachette, se contentant de voler des moments furtifs pour se rencontrer lors de déplacements des caravanes, pendant la période de transhumance entre le Sud et les Hauts Plateaux, notamment dans la région de Bazer-Sakra où ils avaient pour habitude de marquer de longues haltes. Seyid s'arrangeait pour parader sur son cheval autour du «haoudedj» (sorte de litière dressée sur le dos d'un chameau) de Hizia, montrant fièrement ses prouesses de cavalier hors pair et Hizia lui répondait, par l'échancrure de la tente, par des sourires complices lui signifiant sans mot dire, sa fidélité et l'intensité de ses sentiments, et lui rappelant, par des apparitions furtives, la splendeur de sa beauté. La liaison ne tarda pas à être découverte et la nouvelle se répandit au sein de la tribu, impitoyable lorsque son honneur est en jeu, poussant Seyid à quitter les lieux. La séparation, raconte-t-on, eut des conséquences fatales sur la santé de Hizia qui décéda peu après, d'une manière mystérieuse, juste après le retour de sa tribu d'une transhumance à Bazer. La mort de sa bien-aimée plongea Seyid dans un profond chagrin, à tel point qu'il abandonna biens et famille pour errer dans le désert avant de s'établir sous une tente dressée sur les berges de l'oued de Ouled Djellal où il demeura jusqu'à sa mort. C'est sur la demande de Seyid que son ami le poète Benguitoun composa en 1878 la célèbre qacida de Hizia, immortalisant par le verbe, cette passion légendaire, et faisant «parler» les sentiments de douleur et de grande détresse de l'amoureux affligé et éploré par la mort de sa bien-aimée.


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