Privation L?enfance n?a ni nom, ni place, ni vraiment un sens dans la majorité des communes. En particulier dans les localités pauvres qui manquent d?infrastructures essentielles et de projets sociaux. Triste et accablante est la situation des enfants dans cette grande wilaya. En effet, de nombreux bambins, originaires de contrées éloignées, sillonnent, dès les premières heures du jour, les différentes artères et les marchés du centre-ville pour mendier. Ils tendent une main tremblante et sale aux passants insensibles. «Que Dieu vous bénisse. Donnez-moi quelques sous pour m?acheter juste un pain», «Aidez-moi avec quelques pièces, s?il vous plaît !» Des mots rébarbatifs qu?ils lancent, d?une voix cristalline et affligée, aux passants indifférents. Ils ne retirent leur bras épuisé qu?après avoir empoché leur argent. D?autres traînent dans les gares toute la journée, en espérant «gagner» quelques dinars pour subvenir aux besoins de leur nombreuse fratrie. Ahlem se cache la tête dans un foulard délavé et poussiéreux. Elle boutonne sa veste terne et rapiécée, avant de monter dans un bus, à la gare routière de la ville de Chlef. Dix ans à peine et c?est une mendiante. La mine abattue, la fillette, originaire de Zeboudja, supplie les voyageurs de lui donner quelques sous. Ahlem raconte que son père ne travaille pas et que tous ses frères sont jeunes. Sa copine, mal vêtue, l?interpelle nerveusement : «Tu as tardé. Viens nous allons quémander ailleurs, si tu n?as rien !» D?innombrables gosses viennent d?autres localités, tout aussi dénuées et reculées, notamment de Chettia, El-Chara, Zeboudja. L?école reste un luxe qu?ils ne connaîtront jamais, car ils commencent à travailler dès leur jeune âge. Les plus chanceux sont ceux qui trouvent un travail de vendeur de cacahuètes, de bonbons, de galettes ou de journaux. Certains deviennent des voleurs invétérés. Ils repèrent leurs victimes au marché, dans la rue? Selon les citoyens, les nouveaux malfaiteurs qui envahissent les cités ne sont pas natifs du centre-ville. «Ce sont les enfants de la misère et de l?indigence», attestent-ils.