Inertie Les partis d?opposition imputent les raisons du statu quo au pouvoir, mais semblent être incapables de faire bouger les choses d?un iota. Ce qui s?est produit jeudi 8 avril 2004 avec le plébiscite de Abdelaziz Bouteflika dans la troisième présidentielle pluraliste de l?Algérie nous pousse d?emblée à poser la question suivante : le pouvoir est-il fort au point de se «payer le luxe» d?un tel écart ou alors puise-t-il sa force dans les faiblesses avérées d?une opposition, censée pourtant apporter les palliatifs à ce pouvoir «totalitaire» honni ? Dans le second cas, nous serions tentés de faire une entorse aux règles immuables de l?orthographe et réinventer, du coup, la transcription du mot opposition, avec un o minuscule en début de phrase par exemple ou alors avec un seul p et avec un n manquant à la fin. En somme, la tentation est tout a fait légitime quand on sait que les partis politiques dits de l?opposition ont fait preuve d?inertie morbide et d?immobilisme dévastateur pour le vrai pluralisme politique. Des partis n?activant que par intermittence, c?est-à-dire par à-coup, le plus souvent dans les décors mornes des salons feutrés, au gré d?échéances conjoncturelles, sans aucune visibilité politique, mais sachant retrouver les mots justes pour justifier leurs faiblesses avérées. «Le pouvoir n?est pas près de céder», «C?est la faute à l?administration», «Nous sommes en pleine dictature», «Un Etat policier», «Un pouvoir corrompu», autant d?arguments restés, pour la vox populi, au stade de la phraséologie car, aux yeux de celle-ci, le bon sens voudrait en toute évidence que l?opposition soit avant tout synonyme d?action, donc apte à bousculer l?ordre établi et redessiner à sa guise la cartographie du champ politique. Mais comment peut-on faire réellement de la politique, de la véritable opposition, accéder aux premières loges alors que l?on ne se prive pas à s?abreuver dans le placenta de ce même pouvoir dont on espère curieusement la pure et simple disparition ? Ainsi et comme dans un combat d?aïkido, le pouvoir puise sa force dans la faiblesse des autres, soit en empêchant toute marge de man?uvre soit en investissant le terrain en prenant à bras-le-corps, la base, seule habilitée à annoncer le verdict des urnes. S?il est vrai que dans nos m?urs politiques, le pouvoir a souvent tendance à verrouiller le champ politique en mettant à sa solde la justice et l?administration, il est tout aussi vrai que des partis manquant terriblement de «jus», aux visions disparates, excellents dans les alliances contre nature et prenant plus le soin de s?égratigner mutuellement que de mettre la main dans la main pour descendre en flammes ce pouvoir maudit, ne font que pérenniser le statu quo. Et c?est cela, peut-être, la plus grande ruse que le pouvoir ait jamais réussie.