Résumé de la 4e partie - La souris tente de préparer la soupe à la brochette, mais dans sa précipitation, toutes ses casseroles débordent... La petite souris, effrayée, laisse tomber son bâton. On n'entend plus rien. En voilà une fameuse cuisson ! dit le roi. Allons, qu'on serve la soupe ! Mais c'est là tout, répondit la souris ; la soupe est partie tout entière dans le feu. C'est une mauvaise plaisanterie, dit le roi. Allons, à la suivante. Je suis née dans la bibliothèque du château, dit la seconde petite souris. Il y a comme un sort sur notre famille : presque aucune de nous n'a le bonheur de pénétrer jusqu'à la salle à manger ou jusqu'à l'office, objet de tous nos désirs. C'est aujourd'hui pour la première fois que j'entre dans cette cuisine. Cependant, pendant mon voyage, j'ai fréquenté plusieurs de ces lieux de délices. Dans cette fameuse bibliothèque qui fut mon berceau, nous eûmes souvent à souffrir de la faim ; mais nous y acquîmes une belle instruction. La nouvelle du concours ouvert par ordre du roi, pour la découverte de la recette de la soupe à la brochette, arriva jusqu'à nous. Ma vieille grand-mère se souvint qu'un jour elle avait entendu un des serviteurs de la bibliothèque lire tout haut, dans un des livres, ce passage : «Le poète est un magicien ; il peut faire de la soupe rien qu'avec une brochette.» Ma grand-mère me demanda si je me sentais poète ; je ne savais même pas ce que cela pouvait être. Allons, me dit-elle, il te faut voyager, et tâcher d'apprendre comment l'on devient poète. C'est au-dessus de mes moyens, répliquai-je. Mais ma grand-mère, qui avait souvent éco uté ce qu'on lisait dans la bibliothèque, me dit que, d'après les plus savantes autorités, il y avait trois ingrédients pour faire un poète : de l'intelligence, de l'imagination et du sentiment. Si tu te procures ces trois choses, dit-elle, tu seras poète, et alors il te sera facile de préparer cette fameuse soupe. Je partis donc en voyage, à la quête de ces trois qualités ; je me dirigeai vers l'ouest. L'intelligence, m'étais-je dit, est la principale des trois ; les deux autres sont bien moins estimées dans ce monde : donc je m'attachai à acquérir d'abord l'intelligence. Mais où la trouver ? «Regarde la fourmi, et tu apprendras la sagesse», a dit un certain roi des Israélites, comme ma grand-mère l'avait encore entendu lire. Donc je marchai sans m'arrêter, jusqu'à ce que j'eusse rencontré la première grande fourmilière. Là, je me mis aux aguets, pour saisir la sagesse au gîte. Les fourmis sont un petit peuple bien respectable ; elles ne sont qu'intelligence. Tout, chez elles, se passe comme un problème de mathématiques qui se résout bien méthodiquement. Travailler, travailler sans cesse et pondre des œufs, c'est là, disent-elles, remplir ses devoirs vis-à-vis du présent et de l'avenir, et elles ne font pas autre chose. (A suivre...)