Images Une mer d'ordures et une odeur nauséabonde ont remplacé les scènes d'insurrection à Sadr City. Quinze jours après les sanglants combats entre miliciens chiites et GI, les chars sont discrets, mais la réhabilitation est stoppée et la mémoire marquée. Aussi soudainement qu'ils sont sortis dans la rue avec leurs kalachnikovs et leurs lance-roquettes pour s'attaquer aux chars américains, les hommes de l'Armée du Mehdi, la milice du chef radical Moqtada Al-Sadr, ont remisé leurs armes. Alors que les patrouilles américaines dans le centre sont plus discrètes, les miliciens se montrent mains nues, même à la prière du vendredi au fin fond de ce quartier chiite déshérité de Bagdad, leurs armes cachées derrière des murets ou dans des sacs à dos. Les combats, au lendemain d'un bain de sang dans la ville sainte de Najaf (Centre) après l'arrestation du représentant du chef radical, avaient été meurtriers. Les miliciens avaient pris le contrôle de postes de police, des hélicoptères Apache avaient frappé. Bilan : au moins 57 morts parmi les Irakiens, selon les hôpitaux. Puis le calme est revenu. «Une délégation de chefs tribaux et de notables a réussi à convaincre les Américains de se retirer du centre. Quand nous avons vu que tout se passait bien, nous avons ordonné aux miliciens de rentrer à la maison et de laisser leurs chances aux policiers. Nous ne souhaitons pas de bain de sang», explique un porte-parole du bureau de Moqtada Al-Sadr, Saïd Abdel al-Chara. Des habitants se remettent difficilement de ces scènes de violence, dont ils attribuent, en partie au moins, la responsabilité aux miliciens. «C'était stupide, irresponsable, d'attaquer des chars avec des armes légères, c'était évident qu'il y aurait plein de morts dans de tels combats», dit sous le couvert de l'anonymat, un épicier de 50 ans. Pour un gradé de la coalition d'occupation, positionné à Sadr City, les insurgés ont voulu tester les limites des soldats américains et sont depuis sonnés par l'ampleur de la réponse. «Ils ont sous-estimé (notre) réponse», estime le sergent Keith Crabtree, numéro 2 du bureau de l'administration civile américaine à Sadr City. «Ils pensaient que nous serions prudents (de peur de faire des victimes) parmi les civils et que nous réagirions timidement», dit-il. Mais, ajoute-t-il, «ils avaient pris le contrôle des postes de police, il était évidemment nécessaire que les policiers les reprennent». Les conséquences sont désastreuses pour la population : tous les travaux de réhabilitation, menés par les autorités d'occupation ont été stoppés, indique-t-on au centre d'aide aux Irakiens mis en place par l'administration civile américaine.