Résumé de la 106e partie - Mlle Haviland préfère aller à Londres avec Charles plutôt qu'avec Magda et Sophie... Cinq Harley Street, la rue des grands médecins. Depuis plusieurs jours je n'avais pas vu mon père. Je le trouvai occupé de tout autre chose que de l'affaire Leonidès et je me mis en quête de Taverner. L'inspecteur, qui avait quelques instants de loisirs, accepta de venir boire quelque chose avec moi. Mon premier soin fut de le féliciter d'avoir élucidé le mystère de «Three Gables». Mes congratulations lui firent plaisir. Il ne paraissait, cependant, qu'à demi-satisfait. — Quoi qu'il en soit, me dit-il, c'est fini et l'accusation tient debout ! On ne peut pas prétendre le contraire. — Croyez-vous qu'ils seront condamnés ? — Impossible à dire. Ainsi qu'il arrive presque toujours dans les affaires de meurtre, parce qu'il ne peut guère en aller autrement, nous n'avons que des preuves indirectes. Tout dépendra de l'impression qu'ils feront sur les jurés ! — Les lettres constituent-elles une charge sérieuse ? — À première vue, oui. On trouve dans plusieurs des allusions à ce que sera leur vie à tous deux lorsque le vieux sera mort. Des phrases comme : «Ce ne sera plus long maintenant !» Naturellement, la défense ergotera. Elle fera valoir que c'est là une formule très innocente, que Leonidès était si vieux que sa femme pouvait raisonnablement penser qu'il ne tarderait pas à mourir de sa belle mort. Jamais il n'est, noir sur blanc, question de poison, mais il y a des passages qui peuvent être interprétés de façon très fâcheuse pour les accusés. Tout dépendra du juge. Si nous avons le vieux Carberry, leur compte est bon ! Il ne pardonne jamais à la femme adultère. J'imagine que c'est Eagles ou Humphrey Kerr que nous trouverons au banc de la défense. Humphrey, dans les affaires comme celle-là, est extraordinaire. Seulement, il aime bien que la tâche lui soit facilitée par les brillants états de service militaire de son client. Avec un objecteur de conscience, il sera moins étincelant qu'à l'habitude. Quant à l'impression qu'ils feront sur les jurés, on ne peut rien prévoir. Avec les jurés, on ne sait jamais ! Ce qu'on peut dire, c'est qu'ils ne sont ni l'un ni l'autre, très sympathiques. Elle, c'est une jolie femme qui a épousé un très vieil homme pour son argent, et lui un objecteur de conscience qui aurait tendance à faire de la neurasthénie. Le crime est banal en soi, tellement conforme aux traditions qu'on se demande comment ils n'ont pas imaginé autre chose ! Bien entendu, il se peut qu'ils prétendent qu'il est seul coupable et qu'elle a tout ignoré ou, au contraire, que c'est elle qui a tout fait et que lui ne savait rien. Il n'est pas impossible non plus qu'ils disent avoir agi de concert. — Vous, que croyez-vous ? Taverner tourna vers moi un visage hermétique. — Moi, je ne crois rien du tout ! J'ai établi des faits, j'ai adressé un rapport au D.P.P. et il a été décidé qu'il y avait lieu de poursuivre. Un point, c'est tout. J'ai fait mon devoir et le reste ne me regarde pas. Vous vouliez connaître ma position, la voilà ! (A suivre ...)