«Avant l?hiver, plus personne ne sera dans la rue», la phrase lancée, en guise de réconfort, par Abdelaziz Bouteflika, président de la République, à la face des sinistrés du tremblement de terre dévastateur survenu le 21 mai 2003, a été relayée, par la suite, par les principaux acteurs du microcosme politique. Quelques jours plus tard, le chef de l?Exécutif, Ahmed Ouyahia, annonce «en grande pompe» l?opération relogement. Mohamed Nadir Hamimid, ministre de l?Habitat, rassurait pour sa part les sinistrés : «Votre problème sera solutionné.» Mais entre les promesses, les v?ux et la réalité amère du terrain, le fossé risque fort de se creuser davantage. D?abord parce qu?il faut trouver en urgence un palliatif aux 19 000 logements effondrés et aux 180 000 autres fortement endommagés. Ensuite parce que l?opération de démolition d?une centaine d?immeubles dans les wilayas de Boumerdès et d?Alger devrait sans doute allonger copieusement la liste des «SDF». Dans un tel cas de figure, alarmant à bien des égards, les 31 000 tentes dressées, à titre provisoire, sur les lieux du désastre s?avéreront trop exiguës pour contenir l?affolante marée humaine sinistrée. Le résultat immédiat que tout le monde redoute : la prolifération des centres de transit et des «favelas» à la périphérie des grands centres urbains. Une sorte «d?exode» forcé avec les risques que cela pourrait engendrer sur l?aménagement du territoire et le tissu socioéconomique, déjà fortement ébranlé. Les «favelas» algériennes sont toujours considérées comme de véritables bombes à retardement aux répercussions dramatiques. Promiscuité, insalubrité, manque d?hygiène et chômage forment souvent le propre de ces bidonvilles à ciel ouvert. Les conséquences ne seront, dès lors, que désastreuses avec la montée en flèche de la criminalité, déjà alarmante en milieu urbain et de la prostitution et les incalculables «péchés capitaux» sans omettre, évidemment, les risques du retour des maladies moyenâgeuses. Le danger reste d?actualité et les autorités sont face à un épineux dilemme : comment éviter le désastre sachant pertinemment que le problème du logement n?est pas uniquement du ressort du «politique» ? Un mois après le séisme, des dizaines de milliers d?Algériens, toutes couches confondues, sont logés dans des camps et attendent des solutions concrètes de la part des autorités. Ces dernières proposent, comme premier traitement, des chalets préfabriqués au nombre de 15 910 uniquement. Un nombre qui devra faire beaucoup de mécontents, pourtant dans l?attente désespérée d?un toit digne en entretenant le fol espoir de passer l?hiver au? chaud.