Résumé de la 111e partie n Marcelle a tout manigancé pour devenir la femme du docteur... Il puiserait, dans cette lecture exaltante, le courage dont il aura grand besoin après ma mort ! Mais je dois revenir à la réalité : le temps qu'il me reste à vivre diminue avec une rapidité effrayante... — Le point le plus important jusqu'à ce jour est que Christiane soit devenue mon amie. Je puis même affirmer que je suis sa seule confidente féminine ! Je peux maintenant lui mettre en tête ce que je veux : elle m'admire et a en moi une confiance aveugle. Elle commence aussi à ne plus croire du tout aux capacités médicales de Denys : c'est très important ! Il ne faut pas que mon adorable gamin puisse contrecarrer mon influence sur elle. Sa santé paraît déjà plus chancelante depuis que je lui ai inculqué l'idée morale du cancer. Ça la travaille, ça la poursuit nuit et jour... Denys aussi est nerveux : il sent un ralentissement très net dans les élans de sa maîtresse qui semble beaucoup moins pressée que lui de se marier ! L'idée de devenir la femme d'un homme qui approchera l'horreur du mal pendant toute sa vie, commence à ne plus sourire du tout à Christiane ! N'importe quelle femme sensible penserait comme elle... — Je ne crois pas qu'il me soit très difficile, maintenant que le terrain psychologique est bien préparé, de persuader Christiane qu'elle a le mal comme Mme Boitard. Il faut simplement que je découvre son corps comme j'ai sondé son cerveau. Ce ne sera que lorsque je connaîtrai à fond sa constitution physique que je trouverai peut-être la faille, le point faible me permettant de lui dire : «Vous êtes atteinte à tel endroit.» La force du cancer est qu'il peut s'attaquer à n'importe quelle partie du corps humain... La cirrhose du père Heurteloup m'a servi pour affirmer que le bonhomme avait aussi un cancer du rein caché par le gonflement démesuré du foie... La mammite de Mme Boitard fut l'admirable mal bénin et visible qui m'a permis de lui faire croire au cancer du sein... La faible constitution thoracique de Christiane devrait me permettre d'aboutir au cancer du poumon, c'est-à-dire à mon propre mal... Ce qui serait prodigieux ! Evidemment, personne, mieux que moi, ne pourrait lui décrire les symptômes moraux qu'elle doit ressentir !.. Et n'ai-je pas là, enfermée dans le tiroir de la commode, l'arme massue que j'ai cachée soigneusement et que je réserve pour porter le coup de grâce ?... Le cancer du poumon offre le double avantage d'être invisible à l'œil nu - donc discutable - et inguérissable. Ce serait admirable d'arriver à insuffler moralement mes souffrances à ma rivale ! Quelle éclatante victoire ! — C'est décidé : je vais lui découvrir un cancer du poumon... Par quels moyens ? Ça, c'est un autre problème ! Mais je suis persuadée que j'aurai le dieu de la chance pour moi. Ma passion pour Denys m'inspirera comme elle m'a soutenue jusqu'à ce jour.» A suivre Guy des Cars