Préoccupation - La guerre civile en cours en Syrie est pour le mouvement jihadiste international une aubaine comme il n'en avait pas bénéficié depuis l'insurrection anti-soviétique en Afghanistan. Les cris de victoire poussés à la mort d'Oussama ben Laden étaient prématurés et Al Qaîda, à la faveur notamment de la guerre en Syrie, est aujourd'hui plus forte et dangereuse que jamais. C'est ce qu'estiment les experts et officiels aux Etats-Unis, ajoutant que si les dirigeants historiques qui ont survécu à la campagne d'élimination ciblée menée par Washington à coups de missiles tirés par des drones continuent à être traqués sans relâche dans la zone pakistano-afghane, le mouvement s'est renforcé, a fait des émules au Moyen-Orient et en Afrique et continue de menacer l'Europe et l'Amérique, assurent-ils. La guerre civile en cours en Syrie est pour le mouvement jihadiste international une aubaine comme il n'en avait pas bénéficié depuis l'insurrection anti-soviétique en Afghanistan, ont estimé les intervenants à un colloque organisé par le groupe de réflexion Jamestown. «Les groupes affiliés à Al Qaîda ont créé en Syrie une alliance disposant d'au moins 45 000 combattants, soit le double du nombre de combattants talibans en Afghanistan», a affirmé l'Australien David Kilcullen, spécialiste des mouvements insurrectionnels, qui a notamment conseillé le commandement américain en Irak. «Al Qaîda se renforce sur tous les fronts. Sa direction a été affaiblie mais pas éliminée». La présence dans les rangs des islamistes radicaux en Syrie de centaines de volontaires venus d'Europe ou d'autres pays occidentaux, où certains vont retourner aguerris, est un sujet majeur d'inquiétude. «Avec l'entraînement qu'ils acquièrent en Syrie, il y a une forte possibilité qu'au cours des deux prochaines années ils soient en mesure d'accomplir le dernier vœu d'Oussama ben Laden, qui était de monter une attaque du genre de celle de Mumbai en Europe», ajoute Bruce Hoffman. Un autre facteur de renforcement du mouvement jihadiste est le tour récent qu'ont pris les événements dans les pays du printemps arabe. «Les thèses d'Al Qaîda avaient été mises en cause par le printemps arabe», explique Bruce Riedel, ancien membre influent de la CIA, aujourd'hui membre de la Brookings Institution. «Le changement n'avait pas été apporté par la terreur mais par Twitter. Mais aujourd'hui tout a changé. Les thèses d'Al-Qaîda ont été validées en 2013, notamment en Egypte. La contre-révolution l'a emporté, l'armée a renversé le gouvernement élu (...) Pour ceux qui veulent rejoindre le mouvement jihadiste les événements au Caire et à Damas valident ce qu'ils ont toujours dit : seul le jihad est la solution aux problèmes du changement dans le monde arabe aujourd'hui». «L'expansion d'Al Qaîda à laquelle nous assistons dans le monde arabe est vraiment phénoménale, supérieure à ce que nous avons vu au cours de la première décennie de son existence», a-t-il conclu.