Résumé de la 16e partie ■ M. le baron essaya son petit tonneau merveilleux. Il frappa dessus avec la baguette, et aussitôt la fumée sortit en prenant la forme d'un géant, et le géant donna vingt-cinq coups de bâton au seigneur. Le meunier, se voyant menacé de retomber dans la misère, se souvint alors des promesses que lui avait faites Mme la Pluie. Sans en parler à sa femme, il prit ses souliers ferrés, sa canne et son manteau de laine et s'en alla bien loin jusqu'à ce qu'il eût trouvé le bord de la mer et la grotte de l'Ouest. Un jour gris régnait dans cette grotte ; un brouillard léger en voilait l'entrée et l'humidité suintait à travers les rochers. De petits esprits y voltigeaient avec des ailes semblables à des nageoires. En passant, ils jetaient de l'eau sur le nez de Jean-Pierre et disaient tout bas : «Mouillons, trempons cet indiscret. Perçons-lui son manteau. Pénétrons à travers ses chaussures.» Mais Jean-Pierre releva le collet de son manteau et marcha hardiment jusqu'au fond de la grotte. Il y trouva Mme la Pluie entourée de nymphes grises, languissantes et enrhumées comme elle. On était alors dans le cœur de l'été ; la Pluie en profitait pour faire ses provisions. Les petits esprits apportaient une à une les gouttes d'eau que le soleil avait enlevées sur la mer, dans les rivières, les bois, les marais et les prairies. Les nymphes recevaient ces gouttes d'eau dans des coupes d'or et les jetaient ensuite dans un grand réservoir. Lorsque Mme la Pluie aperçut Jean-Pierre, elle se mit à bâiller, puis elle se moucha, et lui dit d'une voix lamentable : « Quel est cet ennuyeux personnage qui vient me troubler dans mes occupations ?» «Madame, répondit le meunier, je suis Jean-Pierre, chez qui vous avez pris un peu de repos il y a longtemps. Vous m'avez promis de vous intéresser au sort de mon enfant. Le petit Pierrot aura bientôt sept ans, je viens vous prier de faire quelque chose pour lui. Il le mérite par sa sagesse, puisqu'il sait déjà lire couramment.» «Que veux-tu que je fasse pour lui ?» «Madame, je suis un pauvre paysan qui n'ai point d'idées. Je ne saurais quoi imaginer ; mais je m'en rapporte à vous.» «Rustre que tu es ! dit Mme la Pluie en éternuant, tu viens me déranger, et tu ne sais pas même ce que tu veux ! Il faut pourtant me débarrasser de cet homme. Puisque son fils sait lire, qu'on lui donne ma grande boîte de cuivre avec la baguette et le livre doré sur tranche. Si le petit Pierrot est moins bête que son père, c'est assez pour faire sa fortune.» Les esprits apportèrent la grande boîte de cuivre, la baguette et le livre doré sur tranche. Jean-Pierre mit le tout sous son bras et s'enfuit en courant. «Ma femme, dit le meunier en arrivant chez lui tout essoufflé, voici un superbe cadeau que Mme la Pluie m'a donné. Elle m'a assuré que, si notre petit Pierrot était moins bête que moi, il y aurait là dedans de quoi faire sa fortune.» (A suivre...)