Déséquilibres Il n?y a pas que le rapport entre salariés cotisants et retraités qui prévaut à l?instabilité de la CNR. D?autres éléments entrent en jeu. Les difficultés financières du système de retraite national ne datent pas d?aujourd?hui. Elles ont commencé à apparaître il y a plus d?une décennie et sont la conjugaison de plusieurs facteurs autant structurels que budgétaires. Pour comprendre les mécanismes de l?instabilité financière de la CNR, il faut remonter à plus de 20 ans, plus exactement à la loi n° 83-12 de juillet 1983. Avant cette date, le système de retraite en Algérie a fonctionné sous forme de différents régimes professionnels couvrant des catégories de travailleurs appartenant à différents secteurs d?activité. La loi de juillet 1983, qui a unifié ces différents régimes de sécurité sociale, a instauré un régime dit de retraite obligatoire, unique et général, basé sur la répartition. Il est géré au moyen de deux caisses : la CNR pour les salariés et la Casnos pour les non-salariés. Ce régime de retraite par répartition, par opposition au régime financé par capitalisation, est bâti sur le principe de garantir aux personnes cessant leur activité un revenu de remplacement proportionnel aux salaires, avec un financement des pensions par la cotisation des salariés encore en activité. Le rapport entre les travailleurs cotisants et les retraités est donc l?ossature du système. Et la stabilité de ce dernier a toujours dépendu de sa capacité d?assurer le maintien du montant des pensions de retraite sans augmenter les cotisations des salariés. Mais depuis le milieu des années 1990, l?évolution du nombre de bénéficiaires et la stagnation, sinon la chute, du nombre de cotisants ont rompu ce bel équilibre. Cette rupture est la conséquence de l?impact des accords du pays avec les institutions financières internationales (FMI) sur l?économie algérienne, notamment son volet relatif à la protection sociale. Par les chiffres, cela s?est traduit par le fait que le rapport entre les cotisants et les retraités qui était de 8 pour 1 en 1986 (3,3 millions de salariés pour 415 000 retraités) a chuté à 3 pour 1 en 1997 (3,015 millions de salariés pour 1,032 million de retraités). Et il va de soi que la législation et les textes réglementant le secteur ont suivi et la loi de 1983 a connu plusieurs modifications ou amendements entre 1994 et 1999. Ainsi, il y eut le décret législatif n°94-10 du 26 mai 1994, instituant la retraite anticipée, suivi de l?ordonnance n°97-13 du 31 mai 1997 permettant la retraite à taux plein avant 60 ans pour les travailleurs ayant 32 ans d?activité et la possibilité de partir après 50 ans à la retraite proportionnelle et enfin la loi n°99-04 de mars 1999, modifiant et complétant la loi de juillet 1983. Mais la dégradation continue des comptes de la CNR a poussé les pouvoirs publics à débattre de sa situation avec les principaux partenaires sociaux du pays dans le cadre du groupe ad hoc de la fameuse tripartite. Celui-ci a dressé autant le diagnostic que les raisons des dysfonctionnements de la CNR (voir encadré) et démontré que le rapport entre salariés cotisants et retraités n?était pas le seul facteur du déficit financier chronique de la CNR qui dure depuis des années. Malgré tous les cris d?alarme et toutes les mises en garde des experts en la matière ou des associations défendant les intérêts des retraités, les pouvoirs publics n?ont pas, jusqu?à aujourd?hui, tranché la question et on ne sait toujours pas de quel type de réforme aura besoin le système de retraite algérien pour les prochaines années.