Un autre degré de la possession est le meskun : le mot signifie littéralement «habité», c'est-à-dire par un djinn. Dans ce cas, le génie prend la victime comme siège ou mieux comme habitation (sekna et, en berbère tamezdught) : il «s'installe en elle». On croit, en général, que ce type de possession n'est pas très grave, le djinn se contentant de parler par la bouche de la personne possédée. ll s'agit généralement de femmes qui soutiennent que des djinns les hantent et les entraînent dans leur univers. Le terme meskuna, «possédée» s'applique ici aux formes les plus diverses de l'hystérie. La véritable possession ? et c'est son degré le plus élevé, donc le plus dangereux ? est le tamlik du verbe malaka (posséder). Le génie s'approprie en quelque sorte sa victime, habitant son corps et son esprit, parlant par sa bouche, commandant ses faits et gestes. La personne ainsi possédée est appelée mamluk, féminin mamluka. L'union entre les deux êtres est si intime qu'on fait même état de mariages entre eux. Evidemment, l'humain est le seuI à voir son «conjoint» surnaturel mais, on croit que celui-ci peut se manifester par certains signes, comme renverser des ustensiles ou entamer de la nourriture. Comme madhrub, mamluk connaît des usages métaphoriques : «Possédé par une chose au point d'oublier tout le reste», «féru de quelque chose», etc. Le c?ur de l'amoureux est ainsi mamluk par sa bien-aimée, mais on peut être également «possédé» par des choses plus prosaïques : la télévision, la nourriture, etc. Un proverbe dit, à propos des artisans habiles qui aiment par-dessus tout leur métier : «Mul sn'a memluk» (celui qui connaît bien son métier, est comme s'il en était possédé).