Le possédé, c'est le medjnun, par référence aux djinns ou génies. On n'emploie pas, comme en arabe classique, le mot madjnoun pour désigner le fou, mais on n'est pas loin de croire que la folie est aussi une forme de possession. En tout cas, le possédé comme le fou ? les Algériens disent mahboul ? jouissent de la même crainte et du même respect auprès du public. On croit, en effet, qu'ils ont accès au monde de l'invisible et qu'ils peuvent donc connaître l'avenir, du moins avoir connaissance de certains faits à venir. Dans le monde des possédés, on distingue divers degrés de possession : il y a les degrés légers, qui ne sont généralement pas considérés comme de la possession proprement dite et les stades avancés où le djinn parle par la bouche de celui qu?il «possède» et agit par son corps. Dans beaucoup de cas, le djinn se manifeste à la personne à laquelle il en veut en l'attaquant. La surprenant dans les lieux qu'il hante, comme les décharges publiques ou les eaux stagnantes, il lui lance des pierres ou des morceaux de bois. La personne ainsi agressée est appelée madhrub, féminin madhruba, au sens propre «frappé». Le madhrub s'en tire généralement sans trop de dégâts, mais il arrive que le djinn le blesse ou alors le trouble au point de le rendre malade. On recommande, quand on reçoit des projectiles dont on ignore la provenance, de ne pas chercher l'agresseur ; il est possible qu'il s'agisse d'un djinn. «Allah yekhzih», dit-on alors (que Dieu le maudisse !). Le mot madhrub a acquis le sens général d'être féru de quelque chose, d'aimer une chose au point d'en être... possédé ! On dit ainsi : madhrub 'ala essahrat (il aime les soirées ou il est fou de soirées), madhruba 'ala dhhab (elle est folle de bijoux), etc.