La tension est montée, ce matin, de plusieurs crans lorsque, excédés, les habitants de la cité Diar El-Kaf ont barré, une nouvelle fois, l?autoroute, empêchant toute circulation. Elles manifestent leur révolte devant la volonté du wali délégué de Bab El-Oued de les déloger et de les transférer, illico presto, vers des chalets à Bordj El-Kiffan. «Nous vivons ici depuis 1957 et nous avons eu une promesse de relogement depuis 1990, voilà qu?on décide de nous emmener dans des chalets. Nous refusons catégoriquement ce déplacement, car nous ne sommes pas des sinistrés. Nous avons une dignité et nous ferons tout pour la préserver», martèle un citoyen au comble de la colère. Un impressionnant dispositif de sécurité est sur place. Des forces antiémeutes, des policiers en civil et des gendarmes ont en face d?eux de vieilles femmes, des hommes et des jeunes brandissant des banderoles de contestation et décidés à aller jusqu?au bout. Devant l?intransigeance des uns et des autres, la tension monte et va crescendo et l?on appréhende d?un moment à l?autre le débordement. Les tentatives de calmer la population sont restées vaines. Ce matin, un camion de Net-Com tente d?emprunter l?autoroute, mais il est vite empêché par des jeunes en colère et visiblement prêts à tout pour faire entendre leur voix. «C?est le wali délégué qui m?a recommandé de passer par là, comment faire alors ?», lance le chauffeur du camion aux agents de sécurité. Ces derniers rétorquent : «Les manifestants ne veulent pas céder le passage. On ne peut rien faire.» Des échauffourées ont éclaté entre quelques manifestants et les forces de l?ordre surtout qu?il était pratiquement impossible de disperser la population et de convaincre les familles de rentrer chez elles en attendant le relogement. Il s?agit du deuxième sit-in observé par ces familles depuis vendredi dernier. Depuis ce jour, aucun responsable local ne s?est manifesté, disent les manifestants qui ont décidé, dès lors, de se prendre charge en décidant de fermer toutes les voies, quoique pacifiquement et ce jusqu?à ce que les autorités locales daignent prendre leurs doléances en charge. «Nous vivons dans des cages à poules depuis plus de quarante ans», rappelle impuissant un citoyen. Un autre au bord de l?explosion abonde dans le même sens : «C?est de Gaulle qui nous a fait installer ici provisoirement et depuis nous y sommes. C?est le provisoire qui dure.» Dans la cité Diar el Kaf, il y a près de 1 000 familles. Certaines ont été recasées dans des logements à Saoula, Draria et Tixeraîne. 68 ont été relogées dans des appartements réaménagés. Il reste plus de 130 qui refusent d?être recasées dans des chalets.