Résumé de la 1re partie ■ Camille Moreau, qui aime jouer à la bourse avec ses économies, rencontre René Degros, expert en la matière... Il s'entoure pourtant de précautions. Les comptes sont numérotés, il y a très peu de papiers et ceux-ci sont détruits dès que possible dans un broyeur. Les sommes lui sont, bien sûr, remises en liquide. Lui-même les remet à son tour à René Degros, qui lui reverse chaque mois les intérêts. En fait, Camille Moreau n'a qu'un souci véritable : la provenance de l'argent. Monsieur René est toujours aussi avare de renseignements. La seule chose qu'il a bien voulu lui dire est qu'il a un contact avec un investisseur étranger et qu'il possède des informateurs dans les différentes places financières mondiales. Pour le reste, c'est toujours le même homme. Admirable de dévouement malgré son grand âge, il force le respect de tous. II se dépense plus que jamais pour les associations caritatives. C'est une figure unanimement appréciée dans la ville... Les mois passent et les sommes continuent d'affluer. D'importantes, elles deviennent considérables : plusieurs milliards d'anciens francs. Alors, brusquement, Camille Moreau prend peur. II fait appel à un détective privé. Il ne lui raconte pas le mécanisme de la banque parallèle ; il se présente comme quelqu'un qui va traiter une grosse affaire avec René Degros et qui, méfiant, voudrait des renseignements sur lui. Les résultats ne tardent pas. Ce cher vieux Monsieur n'est pas la bonne âme qu'on pourrait croire. Il a abandonné sa femme et ses enfants pour rejoindre les compagnons d'Emmaüs. Mais il a quitté ces derniers à la suite d'un différend avec l'abbé Pierre, qui l'accusait de détourner des fonds. Curieusement, le détective ne dit rien des placements miracles à cent vingt pour cent, preuve que le secret est bien gardé ou simplement qu'il n'a pas fait assez sérieusement son travail, mais il apporte quand même des précisions dans ce domaine. René Degros n'en est pas à son coup d'essai : il a déjà été inculpé quatorze fois pour exercice illégal de la profession de banquier. Cette fois, Camille Moreau doit impérativement agir. Mais il a beau réfléchir ; retourner la situation sous tous les angles, il ne voit pas quoi faire. Il ne peut se résoudre à porter plainte, c'est-à-dire à se dénoncer lui-même : ce serait la ruine et la prison, c'est au-dessus de ses forces. S'enfuir ; tout laisser là ? Cela non plus, ce n'est pas possible. II ne peut abandonner ses clients qui lui ont fait confiance, qui lui ont confié quelquefois toute leur fortune. Sans compter que cela pourrait même être dangereux : certains sont loin d'être des enfants de chœur. Alors, Camille Moreau reste. Il essaie de se convaincre qu'après quatorze tentatives malhonnêtes, Monsieur René a enfin trouvé le filon légal, qu'il n'y a rien de louche derrière les placements miracles, qu'il s'agit bien de spéculations sur les marchés asiatiques et les paradis fiscaux... Nous sommes à présent en 1986 et c'est l'inverse de ce qu'avait envisagé Camille Moreau qui se produit : c'est René Degros qui le quitte. II lui annonce un beau jour : — Mon cher Camille, je vais avoir quatre-vingts ans et ma santé n'est plus ce qu'elle était. Je dois songer à me retirer. Camille Moreau n'est pas surpris de cette décision. II se demandait même comment Monsieur René pouvait avoir encore une telle activité à son âge, mais cela ne l'empêche pas d'être terrorisé. Car il ne sait toujours absolument rien des placements et il va se retrouver avec ses clients qui vont exiger leurs dix pour cent mensuels ! A suivre