Résumé de la 1re partie 1950. Pour la première fois depuis 8 ans, Mme Hertog, Hollandaise, va revoir sa fille Bertha que sa nurse malaise a réussi à cacher dans la jungle pendant la guerre. Ce «non» d'une petite fille de treize ans, froid, sec, irrémédiable, va tuer vingt personnes. Mme Hertog attend dans le bureau du consul. Elle est pâle, les épreuves et les maternités l'ont vieillie. Des pas dans le couloir... La porte s'ouvre, une petite silhouette surgit, dans une robe de cotonnade, avec des boucles d'oreilles javanaises. Mme Hertog se dresse, hurle : «Bertha ! Bertha !» Et elle se précipite pour l'embrasser. Bertha reste raide. Le sourire avec lequel elle avait accueilli le fonctionnaire est effacé. Mme Hertog voit devant elle son portrait vivant car Bertha lui ressemble trait pour trait. Mais ce reflet d'elle-même se ferme à son apparition, ces mâchoires se serrent, ces yeux deviennent froids jusqu?à l?hostilité. Che Aminah est entrée derrière elle. «Pourquoi êtes-vous revenue ? demande-t-elle. Oui ou non m'avez-vous donné votre fille en 1942 ? ? Je ne vous ai jamais donné Bertha ni à vous ni à personne d'autre ! ? Vous m'avez fait jurer de ne jamais m'en séparer ? ? Oui. ? Eh bien, je ne m'en séparerai pas.» Alors Bertha prend la parole. Elle parle en anglais, lentement, avec un tremblement de colère et d'indignation dans sa voix de petite fille. «Bien sûr, vous êtes ma mère... Je le sais ! Mais si vous êtes ma mère, si vous m?aimez comme une véritable mère, pourquoi vous ne nous laissez pas tranquilles ? Je ne vous ai pas vue depuis huit ans J'aime ma vie... je ne veux pas de la vôtre... Vous n'avez pas le droit de me voler !» Mme Hertog s'est laissée tomber dans le fauteuil du consul. Les mains tremblantes sur le bureau, elle se contient pour ne pas pleurer. Pourtant, après un long silence, elle se lève à nouveau, s'approche de Bertha et lui demande : «Bertha, voulez-vous m'embrasser ?» Bertha hausse les épaules, se détourne et va embrasser Che Aminah. Alors se déclenche une bataille juridique. Le tribunal de Singapour ordonne à Che Aminah de rendre l'enfant à ses parents. Che Aminah refuse et fait appel. Cette fois, la cour lui donne raison. Bertha reste auprès d'elle. Fin du deuxième acte et voici le troisième. Décembre 1950. Mme et M. Hertog écoutent la radio de Singapour. Leurs valises sont prêtes devant eux. Ils sont dans le bureau de la mère supérieure d'un couvent catholique de la ville. Bertha, dans la cour, regarde les autres enfants jouer à la balle. Elle ne participe pas aux jeux. Pourquoi ? D?abord, parce qu'à cause d'elle, un cordon de police, mitraillette au bras, encercle le couvent. Parce que depuis huit ans, depuis l'entrée des Japonais à Singapour, la ville n'a pas connu de telles angoisses. Le couvre-feu est proclamé, fixé à vingt et une heures. Les chars britanniques sont postés à tous les carrefours. Dans toute la ville, des petits groupes se forment, prêts à s'unir pour marcher vers le palais de justice ! C'est qu'on attend aujourd'hui la décision de la Cour suprême. La famille Hertog a de nouveau porté plainte et, cette fois, la police britannique a conduit de force Bertha dans ce couvent. Pour les chrétiens comme pour les musulmans, ce n'est pas seulement le sort de Bertha qui va se jouer. C'est l'épreuve de force, le choix de deux mondes. De plus, si Bertha ne joue plus à la balle, c?est qu'elle n'est plus une enfant. Le 2 août 1950 dernier à Singapour, elle s'est mariée ! Elle n'avait donc encore que treize ans lorsqu'elle a épousé, selon le rite musulman, un jeune instituteur malais de vingt-deux ans. (à suivre...)